Après 7 ans de blogging, s'il y a une marque dont on a bien trop peu parlé, c'est sans aucun doute Barbour. Il est temps de remédier à cela.
Pour ceux qui ne connaîtraient pas trop la marque, Barbour occupe plus ou moins le même segment de marché que la marque Aigle en France ou Carhartt aux États-Unis.
À savoir celui des marques "héritage", empreintes d'un fort ADN workwear, et d'une culture de la qualité sur leurs produits historiques : vêtements de travail chez Carhartt, bottes en caoutchouc chez Aigle, et bien entendu, parkas chez Barbour.
Naissance de Barbour à South Shields
L'histoire de Barbour commence en 1894 à South Shields, une cité portuaire située sur l'estuaire de la rivière Tyne, à 6 km en aval de Newcastle.
South Shields est historiquement un port de pêcheurs, qui connaît un boom lors de la révolution industrielle. C'est à la fin de cette période, en 1894, que l'écossais John Barbour y fonde son entreprise textile pour importer des toiles cirées, puis fournir aux marins et dockers de l'époque des manteaux conçus dans cette même toile.
L'émergence de Barbour, entre workwear et marque "lifestyle"
Des usages de plus en plus nombreux
Les usages des vêtements de pluie Barbour se diversifieront par la suite pour toucher toutes les autres professions à la recherche de vêtements solides et imperméables : forestiers, paysans, cochers, militaires.
Dans l'entre-deux-guerres, la marque sort peu à peu des usages purement professionnels. C'est alors au tour des motocyclistes d'avoir une ligne qui leur est spécialement destinée, fondée en 1934, et qui existe toujours : Barbour International.
Barbour et les sous-mariniers de la Seconde Guerre mondiale
Durant la Seconde Guerre mondiale, Barbour habille la Navy, avec des modèles spécialement développés pour les sous-mariniers, à l'initiative du capitaine George Phillips, commandant du sous-marin HMS Ursula, qui n'était pas satisfait des uniformes du rang.
Après avoir observé un membre de son équipage qui portait un overall Barbour (une sorte de salopette intégrale), il approcha Barbour pour concevoir un nouvel uniforme en deux pièces, comprenant veste et pantalon.
Une émergence comme marque "lifestyle"
Ce n'est que dans l'après-guerre que Barbour deviendra une marque "lifestyle" avec des lignes de vêtements plus urbaines, conçues pour tout le monde. Mais les vestes iconiques, datant du milieu du 20ième siècle, restent au centre de l'offre Barbour.
Ces modèles en toiles cirées n'évolueront que peu au fil du temps : ajouts de poches, raccourcissement des vestes et silhouettes plus élancées.
Cette évolution prudente et soucieuse de la tradition s'explique en grande partie par le fait que Barbour est encore aujourd'hui une entreprise familiale. Avec à sa tête, Dame Margaret Barbour, qui en est la présidente suite à la disparition subite de son époux John Barbour (4ième génération) en 1968.
Sa fille Helen Barbour (5ième génération) assure aujourd'hui les fonctions de vice-présidente. Nous avons eu le plaisir d'interviewer Helen lors de notre voyage au Royaume-Uni :
Une des rares marques possédant trois Royal Warrants
Dernière pierre de l'édifice qu'est Barbour aujourd'hui, les Royal Warrants of Appointments. Ce sont des labels qui indiquent qu'une société fournit une cour royale. La société détentrice est ainsi mise en avant, et jouit d'une certaine aura de prestige.
Barbour est la seule marque de vêtements à en posséder trois, puisqu'elle fournit la cour du Duc d'Edinburgh (1974), la cour de la Reine Elizabeth II (1982), et celle du Prince de Galles (1987).
Et Dame Margareth Barbour a d'ailleurs été anoblie par la Reine Elizabeth II (d'où le "Dame" qui est un titre de noblesse).
La production des vestes Barbour à South Shields
Les produits Barbour sont aujourd'hui distribués dans plus de 40 pays dans le Monde, avec une quarantaine de magasins en propre, mais un seul en France, situé à Deauville (c'est plus logique que de l'avoir monté à Marseille) mais plusieurs franchises à Paris et Lyon par exemple.
Quant aux produits, si une partie importante n'est plus réalisée en Europe, toutes les vestes de la gamme classique restent produites à South Shields (les autres vestes sont faites en Europe de l'Est pour des finitions identiques).
Barbour est le plus gros employeur de la région de South Shields, avec près de 600 personnes, dont 150 dans le seul atelier de production des vestes (qui s'occupe également des réparations pour le Royaume-Uni).
Nous avons pu visiter cet atelier où il reigne vraiment une très bonne ambiance. Merci à l'accueil chaleureux des équipes de Barbour !
Pour conclure avec quelques chiffres :
- l'atelier de South Shields produit en moyenne 3.000 vestes par semaine, pour une cinquantaine de références,
- chaque ouvrier qualifié produit quelques 25 vestes par semaine,
- une veste demande 1h30 de travail,
- 90% des employés ont plus d'un an d'ancienneté, et beaucoup travaillent aussi depuis plus de 10 ans,
- cirer une vieille veste prend 15 minutes,
- plus de 25.000 vestes par an sont envoyées à Barbour pour être réparés, rénovées ou rewaxées, dont 14.000 vestes sont traitées à South Shields.
Le travail de ces ouvrières doit être parfaitement réalisé du premier coup, car une veste avec un défaut est compliquée à remonter.
En effet, les coutures ne peuvent pas toujours être refaites, car les trous d'une couture mal faite plombent l'étanchéité du vêtement. On a donc affaire à une grande précision dans le savoir faire.
C'est la spécialisation des tâches et l'organisation en chaîne de montage qui permet de les produire rapidement, à coûts maîtrisés, et avec un standard de qualité élevé.
Et Barbour maintenant ?
Les produits Barbour jouissent depuis quelques années d'un certain effet de mode, entre apparitions dans de nombreux films, dont James Bond (ce n'était pas un placement de produit, simplement un souhait des réalisateurs et costumiers), et stars du rock...
Dans un second article à paraître très prochainement, je vais vous présenter le designer homme de Barbour qui nous montrera de très nombreuses pièces d'archive, et la logique fonctionnelle derrière chaque pièce.
On verra enfin l'avenir de la marque, qui se lance dans de nombreuses innovations techniques, entre respect de la tradition et innovations du futur (eh oui, on parlera encore d'urban techwear !).