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Caroline Young est une journaliste et autrice écossaise, passionnée de mode et d'Alfred Hitchcock. L'échange est volontiers pointu : on a en effet chacun noté plein de petits détails signifiants sur les costumes des « Oiseaux ».On aborde aussi d'autres sujets : le style hollywoodien, les vieux films, le Prince Charles et même le fameux groupe écossais Arab Strap, que j'ai déjà pu interviewer dans une autre vie. Mais on s'accorde en priorité sur une chose : si vous vous intéressez de près au vêtement, le cinéma d'Alfred Hitchcock est un passage vivement conseillé pour mieux comprendre les liens étroits qui unissent la mode et le cinéma. Caroline Young vous raconte.
« J’ai toujours été fan des films d’Alfred Hitchcock et ce depuis mon adolescence. Le premier film que j’ai vu, c’était je pense « Fenêtre sur cour » et j’ai adoré. À partir de là, Hitchcock est devenu l’un de mes réalisateurs préférés. Quant à la mode, ce qui m’a surtout captivée ce sont les histoires liées aux costumes dans les films classiques. Je m’y suis beaucoup intéressée en lisant des choses sur des costumiers comme Adrian ou Edith Head et en regardant tous les films des années 30. J’ai écrit un livre qui s’appelle « Classic Hollywood Style » en 2012.
J'ai aussi travaillé au Herald’s à Glasgow où j’écrivais sur la mode. J’ai écrit d'autres livres, sur le motif tartan par exemple. En ce qui concerne Alfred Hitchcock, j’ai mis tous mes intérêts en commun : l’amour du cinéma et l’amour de la mode. J'ai publié un livre sur les héroïnes d’Hitchcock en 2018, qui observe plus particulièrement les femmes et leur style dans les films du cinéaste, comment il en a construit l’image, etc.
En fait, je m’intéresse à la fois à Alfred Hitchcock et à Edith Head. Cela me semblait donc logique de combiner les deux d'autant qu'il n’existait pas de livre exclusivement consacré à ces deux personnages. Leur image est tellement emblématique, bien plus que n’importe qui dans les coulisses d’Hollywood et de son âge d’or.
Edith Head est une créatrice qui a toujours aimé écouter les réalisateurs, les producteurs, les actrices. C’est la raison pour laquelle elle a si bien réussi : elle prenait en compte les opinions des gens, elle était aussi toujours très réceptive. Lorsqu’elle savait ce que voulait un réalisateur, elle essayait de l'aider à traduire sa vision artistique.
Elle concevait également des vêtements avec lesquels les actrices se sentaient à l’aise. Je n’imagine pas vraiment qu’il y ait pu y avoir beaucoup de conflits entre elle et lui. Je pense aussi qu’elle avait un fort pouvoir de persuasion et un point de vue similaire à celui d'Hitchcock concernant les vêtements. Ils ne devaient être ni trop serrés ni trop flashy ou révélateurs.
Edith Head n’a jamais créé de costumes très innovants d’un point de vue créatif. C’était toujours assez classique. Elle ne voulait pas que les films et les costumes puissent être datés, obsolètes. Son travail était en phase avec ce que recherchait Hitchcock. Elle le comprenait et je pense que c’est pour cette raison qu’ils ont travaillé sur 11 films ensemble. »
Ce qu'il faut voir côté style
Lorsqu'on questionne Caroline Young sur les costumes des « Oiseaux », elle en raconte la singularité avec une précision étonnante, comme si elle avait vu ce film des centaines de fois. À l'image de l'ensemble de l'œuvre du cinéaste, rien n'est laissé au hasard dans le vestiaire des « Oiseaux ». Petite revue des principales choses à observer, racontée par Caroline Young elle-même.
1. Le style de Tippi Hedren, la blonde hitchcockienne idéale
« On retrouve dans « Les Oiseaux » tout ce qui fait la particularité du style vestimentaire des femmes chez Hitchcock. Tippi Hedren y incarne complètement l’héroïne hitchcockienne. Au moment où le film a été tourné, Hitchcock avait travaillé avec Edith Head sur un certain nombre de films. Je pense qu’elle était vraiment à l’écoute de ce qu’il recherchait et à la manière dont il souhaitait représenter les femmes de cette histoire à l’écran.
Tippi Hedren était pour lui la blonde idéale. Il souhaitait qu’elle devienne la nouvelle Grace Kelly. Une bonne partie de ce qu’elle porte dans « Les Oiseaux » a d'ailleurs pour référence le style et les tenues de Grace Kelly dans « Fenêtre sur cour » : on retrouve les ensembles, les perles, les cheveux blonds. C'est la même élégance, quand bien même les vêtements de Tippi Hedren sont particulièrement malmenés dans « Les Oiseaux » : son tailleur est déchiré et sali par les attaques des oiseaux.
Au fond, je pense qu'Alfred Hitchcock a toujours aimé cette idée qu’une femme impeccablement habillée au premier plan puisse être ensuite torturée à l’écran. Les vêtements de Tippi Hedren font d’une certaine manière partie du récit : ils montrent l'épreuve qu'elle traverse.
Tippi Hedren n’a que peu de costumes dans le film. Elle porte d'abord un ensemble tailleur noir. Il a quelque chose de Chanel dans le style. Certains ont vu dans cette tenue, sa matière et sa texture, un lien évident avec la couleur et le plumage des corbeaux. On peut d'ailleurs entendre ces oiseaux croasser dans les airs au début du film.
Elle porte ensuite un manteau de fourrure et un ensemble vert pâle. Le manteau de fourrure de Tippi Hedren rappelle le personnage de Tallulah Bankhead dans un autre film d'Hitchcock, « Carlos Castillo très inspirants. Ensuite parce que je possède déjà une Kennedy jacket de la marque espagnole et que je ne serais pas contre une deuxième. Il y a en prime l'inspiration Kennedy dedans, ce qui va bien avec l'idée originale d'Hitchcock pour le look de son personnage.
On peut cependant regarder du côté de Drake's pour d'autres inspirations, toujours justes comme ci-dessus. Ou chez des marques plus traditionnellement associées au tweed comme Thomas Farthing ou Walker Slater. Pour d'autres pistes de vestes automnales, on peut aussi regarder notre petite sélection ci-dessous.
2. Le pantalon cargo
Autre pièce intéressante à découvrir dans le vestiaire de Rod Taylor : un pantalon d'inspiration militaire, avec des poches de type cargo placées un peu plus haut que ce que l'on voit d'habitude. Notez qu'il est de couleur verte. On peut sans doute trouver des modèles similaires au rayon vintage, en friperies militaires par exemple ou possiblement chez Brut Clothing.
Il est bien sûr possible de dénicher des pantalons cargo plus contemporains, et pas nécessairement verts. Il en existe chez de nombreuses marques, dans toutes les coupes et matières. C'est un pantalon polyvalent, facile à porter et ce dans différents registres : workwear, sportswear, rock, voire pourquoi pas un peu tout ça à la fois.
3. Les boots workwear
Une dernière merveille à retenir du vestiaire de Rod Taylor dans « Les Oiseaux » : une paire de chaussures en cuir marron d'inspiration workwear. C'est la paire de chaussures parfaite pour ce type d'aventure. La marque américaine Red Wing s'est bien sûr spécialisée dans ce type de chaussures tout terrain. Mais on peut en trouver chez de nombreuses autres marques, d'Alden à Jacques & Déméter. Au passage, vous noterez sur la photographie ci-dessous la simplicité de la tenue. Marron, vert, blanc - le blanc étant présent à travers les chaussettes et la chemise blanche, qu'on pourrait d'ailleurs tout à fait choisir en Oxford.
On peut néanmoins préférer des modèles moins rustiques. Question de style et d'affinités. C'est une problématique qui revient régulièrement : que choisir entre boots workwear et habillées, et comment les porter ? La réponse se trouve peut-être pour vous dans l'article ci-dessous.