Ce que j’ai appris de la mode au Japon

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Je ne sais pas vous mais moi, je ne peux pas m’empêcher d’analyser les tenues que je croise. J’y découvre plein d’idées intéressantes à Paris, alors imaginez dans un des pays les plus pointus de la mode. En fait, n’imaginez pas. Moi et ma pellicule d’Iphone saturée après mes vacances au Japon, on vous y emmène.

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Entre tradition et modernité

Cette phrase décrit aussi bien le Japon (où j’ai découvert les toilettes du futur entre deux temples Shinto) que la variété des tenues dans ses rues. Les grands classiques qui nous habillent depuis des décennies y cohabitent avec des vêtements plus modernes, des coupes plus extravagantes et quelques explosions de couleurs par-ci par-là.

Parmi les tenues qui m’ont marqué, il y a bien sûr celles des amateurs de denim et de patine comme ce Monsieur, conseiller à la boutique Momotaro d’Osaka (juste en face de notre hostel, sans vouloir faire de jaloux).

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Quand il se l'était procurée, sa veste était d’un bleu indigo profond. Mais ça, c’était avant qu’il ne fasse équipe avec sa machine à laver et les rayons du soleil pour la poncer à fond. Les nuances étaient vraiment superbes.

Il y a aussi les approches plus "tendance", souvent chez des jeunes qui préfèrent les jeux de volumes aux délavages. Et là aussi, ça envoie.

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Même sur un classique look rock, je remarque des pièces au design plus pointu comme celui de ce jean.

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Après le workwear, le minimalisme et le rock, il y a des looks streetwear très cools comme celui-ci. Là aussi, des grands classiques et des détails plus contemporains.

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Côté Gorpcore et Techwear, Benoît (notre co-fondateur qui en est fan) aurait été servi.

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Les tenues casual chic sont très bien revisitées également. Ici, avec des Nike (probablement des Panda) alors qu’on aurait plutôt vu des Stan Smith ou autres sneakers minimalistes chez nous.

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Des tenues marquantes, j’en voyais chez toutes les générations. Le niveau de classe supérieur de ce Monsieur devrait suffire comme preuve.

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Et ce, même pour les looks extravagants flirtant avec l'univers Harajuku (un quartier de la mode haut en couleurs à Tokyo).

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Quels que soient les registres, je sens que la plupart des japonais placent la barre très haut quand ils composent leurs tenues. J'y retrouve ce jusqu’auboutisme qu’on connaît bien chez eux. C’est peut-être l’effet du voyage, mais j’ai l’impression d’être bien plus souvent interpellé par un look que quand je suis à Paris.

Le minimalisme à la japonaise

L'esthétique japonaise sait puiser la beauté dans la simplicité et ça se ressent dans leur approche des looks minimalistes : des matières unies, des couleurs sobres, pas ou peu de logos et des jeux de coupes qui rendent le tout très intéressant.

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L’archipel a pris le large

Alors que la vague du slim fait encore fureur en Europe, les japonais ont l’air d’avoir élargi leurs pantalons depuis un certain temps. Pas que les pantalons d’ailleurs. Il y a une vraie maîtrise des volumes dans la plupart des looks, de haut en bas.

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Ce qui explique l’omniprésence de manteaux amples et surtout de macs. J’en vois partout avec, là aussi, des volumes maîtrisés qui montrent la différence entre une coupe oversized et un vêtement trop grand.

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C’est d’ailleurs pour ça que notre équipe produit s’était inspirée des macs japonais pour créer le nôtre, le Glencoe, dont je vous racontais la conception ici.

L’harmonie des couleurs

Là aussi, il y a un vrai sens du détail et un jusqu’auboutisme dans la plupart des looks. Et ils visent très juste. Il y a par exemple ces deux camaïeux de beiges, aussi beaux que ceux qu’on trouvait sur leurs architectures traditionnelles.

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Ou cette continuité de gris relevée par les motifs jaunes et orange par exemple.

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L’amour de l’Amérique

Résumons grossièrement (sinon vous êtes encore devant cet article après-demain) : après la seconde guerre mondiale et sous l’occupation des américains, les japonais se sont pris de passion pour leurs vêtements iconiques qui étaient un vecteur de valorisation sociale. Leurs marques et tisserands se sont mis à les reproduire avec l'obsession japonaise pour les détails qui a mené, entre autres, à la naissance des plus beaux denims à nos yeux.

Nous sommes d’ailleurs très heureux de pouvoir compter des denims japonais parmi les jeans de notre collection. Si vous voulez voir de plus près, c’est par ici.

Pour ceux qui ne connaissent pas encore ce phénomène ou qui veulent en savoir plus dessus, la bible qui le décrypte s’appelle “Ametora: How Japan Saved American Style” et elle a été écrite par W. David Marx.

Cet héritage US se voit sur les portants des boutiques, sur les uniformes des lycéens et sur des ootd qui m’invitaient aussi indirectement que subtilement à aller me rhabiller.

Pour commencer, il y a évidemment les jeans et les vestes en denim. Comme partout finalement mais ici, ces dernières sont très nombreuses et reprennent plus souvent l’esthétique de la type 2, modèle de chez Levi’s apprécié par les puristes et réinterprété par les marques japonaises. Avec des denims de folie, évidemment.

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Pas mal de coach jackets aussi dont celle-ci, portée dans un look qui manie très bien les couleurs (mention spéciale aux Vans mauves et d’ailleurs, d’autres idées pour porter le violet et ses déclinaisons vous attendent ici).

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Comme leurs nom l’indique, elles étaient portées par les coachs américains dans les années 80 puis reprises par la culture streetwear dans les années 90.

On vous raconte l’histoire de la coach jacket  dans la présentation de notre propre réinterprétation : la veste Oropa.

Beaucoup de traditionnels chinos beiges, créés par les britanniques, portés par les soldats américains pendant la seconde guerre mondiale puis repris par les japonais avec une attention particulière portée aux volumes.

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D'ailleurs, les vêtements militaires sont omniprésents.

Des parkas M65, modèle qui avait fait son entrée dans l’armée américaine en 1965 (d’où son nom).

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Beaucoup de Parkas M51, dîtes “fishtail”, produites en masse en 1951 pour l’armée américaine. À l’époque, elles remplaçaient notamment la M48 pour des raisons de coûts de production.

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Des bombers, qui étaient portés par les aviateurs et des deck jackets, qui étaient portés par l’US Navy.

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Bien sûr, il a les pantalons cargos. Bien qu’ils étaient initialement conçus pour l’armée britannique, ils ont ensuite été repris par les unités spéciales américaines pour la seconde guerre mondiale.

Et là aussi, c’est le festival des beaux volumes.

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Je vois aussi pas mal de liners, bien plus démocratisés qu'en France. Démonstration par ce couple japonais très sympathique qui mérite la légion d’honneur du style.

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Mais il n’y a pas que le vestiaire des militaires américains qui a séduit les japonais. Il y a aussi celui des étudiants, la sainte Ivy League qui les a autant inspirés que nous. Ça me saute surtout aux yeux quand je vois les uniformes des lycéens.


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Oui, les lycéens japonais portent des penny loafers. À leur âge, je portais des schmoove.

Qui dit vestiaire américain dit looks workwear et là aussi, je me suis régalé. Et une fois de plus, ils ne tombent pas dans une panoplie au premier degré. Dans les tenues qui m’ont touché, il y a toujours un vêtement ou un accessoire d’un autre registre qui vient twister l'ensemble.

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La veste d’inspiration workwear vs les sneakers plus streetwear.
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Le pantalon et les boots vs la casquette New Era.
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Boots Red Wing et veste en denim vs marinière et béret.
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Le pantalon fluide et lisse sort complètement de l’univers workwear et pourtant, c’est super bien amené avec la veste et les boots.

Et ce t-shirt Mickey m’y fait penser : la pop culture américaine y semble très appréciée aussi, autant sur les tenues que dans les friperies.

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Et les costumes ?

Beaucoup de cadres qui en portent des ensembles assez classiques, pas grand-chose à signaler de ce côté MAIS qu’en est-il du costume porté pour le plaisir ?

Eh bien je vois très peu de japonais détourner le costume traditionnel au quotidien. Peut-être parce qu’il est plus subit que chez nous dans un cadre professionnel ?

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En revanche, pas mal d’ensembles veste et pantalon coordonnés, dans des registres plus soft tailoring et workwear comme celui-ci :

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Avec ce genre d’ensemble, un t-shirt, une paire de sneakers en toile et l’outfit est prêt. Prêt, différenciant et plus décontracté qu’un costume traditionnel, avec moins de structure et plus de poches utilisables.

On a nous-même exploré ces nouvelles formes de costume dans notre collection. Le dernier ensemble en date étant notre ensemble veste et pantalon Kamikoshi que je vous présente ici.

Comme partout, le confort l’a donc emporté au Japon. Ce qu’on va d’ailleurs observer dans le point suivant.

Style = Confort

Vous l’avez vu pour les coupes et vous l’avez peut-être aussi remarqué au niveau des pieds : les baskets chaussent presque tous les looks qui ont retenu mon attention. Et plus largement, presque tous les looks en général.

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Et ce, même quand la tenue est dans un registre qui ne s’y prêterait pas à première vue. Ils ont l'air de s'en ficher et souvent, ça donne justement la touche d’inattendu qui rend la tenue remarquable.

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Cette tenue, je l'aurais sûrement finie par des derbies ou des mocassins. Ce Monsieur a préféré régler le confort sur 200% et je trouve que ça fonctionne bien.
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Des Nike Huarache avec un trench-coat et une malette en cuir ? Challenge accepted, avec un hoodie qui ramène l’équilibre.

Parfois, la quête du confort va jusqu’aux Crocs (oui) et même là, c’est fait avec brio (ça devient presque énervant).

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Short BonneGueule, pull top secret, chemise YMC, débardeur vintage, mocassins Morjas, casquette vintage.

Je m’attendais au moins à voir plus de souliers décontractés tels que des Paraboots, marque adorée par les japonais. Finalement, la première paire, je la remarque au bout d'une semaine, à la télé dans un restaurant.

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Dans cette émission, plusieurs personnes défilent devant un jury après ce qui semble être un relooking. Ici, costume décontracté, coupes confort et Paraboots Michael.

En bonus, ma quête de la souvenir jacket parfaite

Je n’allais quand même pas évoquer mon voyage au Japon sans parler shopping. Surtout pour un vêtement aussi mythique.

Pendant leur présence au Japon après la seconde guerre mondiale, les soldats américains veulent ramener des souvenirs à la maison. Ils se font fabriquer des blousons légers (à une période, ils auraient été faits à partir d’excédents de tissus de parachute). Ils les font d'abord broder avec des motifs militaires puis le font avec des dessins et couleurs qui évoquent le floklore japonais : tigres, dragons, fleurs, oiseaux... Pour qu’ils plaisent aux GIs, les fabricants japonais les taillent dans l’esthétique des Varsity Jackets des universités américaines. La souvenir jacket est ensuite reprise par les japonais du mouvement de mode “sukaman” (contraction de Yokosuka Mambo, en référence à la ville où les premières souvenir jacket sont apparues), reprenant la panoplie du soldat américain (jusqu’à la coupe de cheveux). La souvenir jacket devient un signe de protestation. Elle habille ensuite un bad boy dans le film japonais Buta to Gunkan en 1961, puis des stars occidentales comme Mick Jagger et devient ainsi iconique au Japon comme dans le reste du monde. Pour découvrir la richesse et les nuances de cette histoire, c’est par ici.

J’ai longtemps été fasciné par cette veste et son esthétique mi-américaine, mi-japonaise. J’adore son style qui rappelle celui des étudiants américain, celui d’une rockstar moderne comme Xavier et Gaspard du groupe Justice dont je suis fan, celui d’un héros au volant d’une Chevrolet sur fond de synthwave (la bise à toi qui lit sûrement ces lignes, Ryan). Et comme je ne suis rien de tout ça, j’en veux évidemment une. La ramener de ses terres d’origines, ce serait justement le souvenir parfait à l'issue de ce voyage.

J’en vois beaucoup dans les boutiques touristiques à Tokyo et Osaka mais il y a un hic.

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Elles sont visuellement très chargées et je cherche justement l’inverse. Une broderie simple, un tigre par exemple, la fameuse inscription “Japan” au cas où mon entourage n’aurait pas compris que j’en reviens et basta.

Dans ces boutiques, il y a juste celle-ci qui est très cool pour environ 200€, mais pas disponible pour habiller mes 1m91.

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Dans les friperies, j’en vois des plus authentiques. Des pièces vintage magnifiques mais là aussi, pas de taille XL-70-au-développé-coucher-ne-sois-pas-jaloux disponible.

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J’en trouve enfin une, non-vintage, à ma taille dans une petite boutique d’Osaka mais…

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… le panda brodé n’est pas très convaincant. Mon ami Antoine me confirme qu’il me donne le charisme d’une courgette donc je poursuis ma quête.

Dernier jour à Tokyo, quartier d'Ueno près des la gare. Je visite les boutiques de Souvenir Jackets les plus connues. Google m’a dit de venir ici. Je sors encore des magasins les mains vides.

En pleine pause takoyaki dans le coin, je repère une petite boutique. Je m’approche du portant exposé dans la rue et j’en vois une avec un tigre, une broderie pas trop chargée et le fameux “Japan”. C’est pile ce que je cherchais. Il y en a une dans ma taille. Je paye l’équivalent de moins de 100€ et je repars heureux comme un enfant.

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Si vous partez au Japon et que vous en cherchez une aussi, fouillez donc au marché Ameyoko à Ueno, Tokyo. Vous avez aussi les friperies à Harajuku et Shibuya.

Vous trouverez d’autres pistes dans notre article dédié à la souvenir jacket ici. De mon côté, je vous remercie pour votre lecture et j’espère que ces streetstyles japonais vous ont donné des idées pour vos propres tenues !

Michel Bojarun Michel Bojarun
Michel Bojarun,

Geek du vêtement à plein temps chez BonneGueule et geek des platines en intérim au Berghain (un jour). Amateur de pantalons droits, de débardeurs, de chaînes dorées, de ceintures western (2cm de largeur max, évidemment) et de *insérer n'importe quel vêtement rétro-kitch*.

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