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SUN IS SHINING » - BOB MARLEYOn peut dire qu’il m’aura fallu du temps pour intégrer le reggae à ma culture musicale. Il y avait pourtant des traces non négligeables dans certains des disques que j’affectionnais plus jeune. Mais il faut croire que le reggae était trop ensoleillé et « nonchalant » pour moi. Le style vestimentaire des artistes phares du genre ne me parlait pas plus que ça.
Avec le temps pourtant, je me suis pris de passion pour certains maîtres du reggae à travers les chansons, les pochettes de disques, et chemin faisant leur manière de s’habiller. Cette musique est depuis l’un de mes remèdes favoris pour gérer les périodes de blues ou d’anxiété. Pour le vêtement aussi, c’est une jolie source d'apaisement : on y mélange en effet les styles avec une certaine harmonie et beaucoup de décontraction.
© Missing Piece Group/IMAGO/Cinema Publishers Collection
Bob Marley, circa 1979.
Lorsque Bob Marley enregistre la première mouture de « Sun Is Shining » en 1971, les Beatles ont en tout cas définitivement tiré le rideau. En Jamaïque, à plusieurs milliers de kilomètres de Londres, on écrit depuis quelques années maintenant d'autres formes musicales : le ska, le rock-steady, le dub ou le reggae, des styles qui traverseront l'océan et influenceront par exemple The Clash ou The Specials, et aussi bien d'autres artistes du monde entier.
La Jamaïque obtient son indépendance du Royaume-Uni en 1962. Robert Nesta + Marley enregistre cette année-là sa première chanson. Il n'a alors que 17 ans et est apprenti soudeur. Il formera par la suite les mythiques Wailers auxquels nombre de ses succès musicaux sont associés.
En matière de musique, le pays n’a jamais été avare de talents : Peter Tosh, King Tubby, Burning Spear, Lee Scratch Perry, Jimmy Cliff, pour ne citer que ceux-là. On pourrait aussi évoquer la moins connue Marcia Griffiths, dont le classique Always Together pourrait bien, si coup de cœur, accompagner votre été. Mais le plus grand ambassadeur musical de la Jamaïque, c'est bien sûr Bob Marley.
À travers lui, vous avez peut-être un style et des images qui vous viennent rapidement en tête : l'imaginaire rasta, les dreadlocks et un véritable patchwork de style pour le vêtement - du denim, du reportage savoureux de 1977. Jetez-y un œil, ne serait-ce que pour les commentaires.
Que peut bien nous apprendre Bob Marley en matière de style estival ? La réponse se trouve dans la photographie de 1979 ci-dessus, alors que le chanteur est désormais une star internationale.
C'est à ma connaissance l'un des plus séduisants looks de Bob Marley, et une part de son attraction réside bien sûr dans ce que l'on ne sait pas. Quelle est la marque de cette veste ? Que porte-t-il comme jeans et comme chaussures ?
Jetons déjà un œil à ce que l’on voit. On découvre une casquette avec de la profondeur. Dans la communauté rastafari que rallie Bob Marley en 1966, on arbore fréquemment des couvre-chefs plus ou moins volumineux selon la masse des cheveux. Le plus symbolique s'appelle tam ou rastacap.
On compose également avec divers styles de vêtements. Ici par exemple, c'est une veste d'esprit militaire, portée vraisemblablement à même la peau, avec un jean. Autres alternatives possibles : les chemises OG107 et jungle jackets de l’armée US, la saharienne voire pourquoi pas la chemise en denim ? Western ou pas, Bob Marley affectionnait cette matière. Jetez par exemple un œil sur ce cliché de 1975 :
© Ian Dickson/Redferns/GettyImages
Aston 'Family Man' Barrett et Bob Marley, backstage à l'Odeon, Birmingham. Juillet 1975.
La veste militaire, la chemise en denim. Tout cela n'est-il pas un peu trop chaud pour la saison me direz-vous ? Certains ont fait les deux, Serge Gainsbourg notamment. De son côté, Bob Marley portait régulièrement des pièces de ce genre.
Certes, les températures ne sont pas toujours tendres en été. Dès lors, on peut de notre côté envisager ces pièces pour le soir ou les journées plus fraîches, sur un tee-shirt blanc par exemple.
Pour le militaire, il y a sans doute matière à trouver des choses intéressantes dans les surplus, les friperies ou certaines marques japonaises comme Orslow. D'autres pistes ici, si besoin :
On conseille ici de privilégier les tons verts. Après tout, c'est une des couleurs phares du drapeau jamaïcain au même titre que le jaune. Ici, cette couleur est très bien portée par Bob Marley :
© Charlie Steiner/Hwy 67 Revisited/Getty Images
Bob Marley, devant chez lui à Kingston en Jamaïque, Juillet 1979.
Mais on reviendra plus en détail sur cette couleur très estivale une autre fois. Si Bob Marley ne disait pas non au denim ou aux inspirations militaires, il appréciait également le sport, le football en particulier, et cela se traduit logiquement jusque dans ses vêtements.
Il portait donc entre autres des baskets, que l'on voit très bien conclure notre look de départ. Pour aller plus loin sur le sujet des sneakers, n’hésitez pas à jeter un œil sur l’histoire de Nicolò :
Toujours dans l’esprit sportswear, notez qu'il n'était pas rare de voir Bob Marley avec un haut de survêtement, comme sur ce cliché ci-dessous datant de 1976. Vous reconnaîtrez la marque facilement : il s'agit d'Adidas. Il n'est pas impossible ou déplacé d'avoir une certaine tendresse pour les trainers et hauts de survêtements vintage de la marque.
© Bobby Bank/WireImage/GettyImages
Bob Marley à New-York, USA. 1976.
À dire vrai, il m’est déjà arrivé d’intégrer ces petites madeleines de Proust dans mon vestiaire. C’était bien avant de me plonger dans les disques de dub et de reggae, et d'apprécier le mariage des styles sportswear et militaire. Vingt ans plus tard, je porte moi aussi la veste ou la chemise militaire chinée, même en été.
Il n'est pas impossible que le grand Bob soit pour quelque chose dans cette évolution. Est-ce à dire que l'été 2021 sera vintage ? Peut-être. Le marché de la seconde main ne touche plus seulement les chineurs invétérés.
La chanson « Sun Is Shining » qui figure sur l'album « Kaya » de 1978 est en tout cas parfaite pour la saison. Sur ce même album, vous retrouverez également le classique « Is This Love ? », qui fait des merveilles jusque dans cette séquence du « Garçu » de Maurice Pialat en 1995.