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le laboratoire de recherche de l’université d’Alberta.Et parce qu’ils ne font pas les choses à moitié, cette équipe de chercheurs a fait porter des tee-shirts dont une moitié était en coton, et l’autre en polyester, à huit hommes et femmes pendant 20 minutes d’exercice physique.
L'expérience s’est déroulée sur une période de 10 semaines.
© Petite pensée pour nos huit cobayes qui ont sans doute connu mieux comme vacances. (Image : Matt Lee - Unsplash.com).
Petite pensée pour nos huit cobayes qui ont sans doute connu mieux comme vacances.
Quelques analyses chromatographiques, détection par spectrométrie et une vingtaine de sessions de lavage de tee-shirts plus tard, ces courageux explorateurs d’odeurs en sont arrivés à la conclusion suivante :
- La partie en polyester avait plus tendance à garder les mauvaises odeurs,
- Elle avait aussi la particularité de les conserver même après le lavage.
Pourquoi ?
Pour une matière, ce qui fera la principale différence en terme d’odeurs, c’est ce qu’elle choisira de retenir entre ses fibres une fois que notre transpiration sera passée par là.
Et les fibres synthétiques, dont notamment le polyester, sont championnes dans un domaine : celui de retenir expressément les déchets bactériens et acides qui “sentent mauvais”.
D’après le Docteur Rachel McQueen, c’est là que deux autres caractéristiques chimiques de la fibre synthétique interviennent :
- Elle déteste l’eau,
- Elle adore les substances huileuses.
Elle va donc se débarrasser de la partie liquide de notre transpiration le plus vite possible par évaporation. Puis, sur les parois de ses fibres plastiques, il ne restera plus que les substances huileuses de notre transpiration, qui ne demanderont qu’à se joindre aux bactéries odorantes soigneusement choisies.
C’est donc parce que la fibre sélectionne expressément les bactéries malodorantes que notre transpiration n'émettra pas la même odeur sur un tee-shirt en polyester que sur une autre matière. Cette odeur étant nettement plus agressive sur les fibres de pétrole.
Pour en remettre une couche, les chercheurs de l’Université de Ghent (Belgique), dont le professeur Nico Boon et le docteur Chris Callewaert, ont découvert une autre source d'odeur piquante : le micrococcus.
Non, ce n’est pas une espèce d’orchidée, mais bien une bactérie malodorante qui n’apprécie pas la vie au sein des fibres naturelles, contrairement à un autre environnement où elle s’amuse plutôt bien : les fibres synthétiques.
© Sur ce graphique, le laboratoire de l'Université de Ghent (Belgique) compare les caractérisations d'odeurs du polyester avec celles du coton après transpiration. Zéro traduisant l'absence d'odeur, et dix relevant de "l'intolérable". Pour "Hedonic value", c'est l'inverse : quatre traduit une odeur "plaisante" et zéro une odeur "déplaisante". (Image : Université de Ghent - Belgique).
Sur ce graphique, le laboratoire de l'Université de Ghent (Belgique) compare les caractérisations d'odeurs du polyester avec celles du coton après transpiration. Zéro traduisant l'absence d'odeur, et dix relevant de "l'intolérable". Pour "Hedonic value", c'est l'inverse : quatre traduit une odeur "plaisante" et zéro une odeur "déplaisante".
A noter par ailleurs que concernant la viscose, aucune bactérie malodorante n’a été trouvée au cours de l’expérience de l’Université de Ghent. Si vous achetez une veste ou un manteau, côté doublure, vous pouvez donc privilégier cette matière.
Pour ce qui est du nylon, il s’agit d’un excellent refuge pour les proprionibacteriums, source d’acné et de mauvaises odeurs. Evitez donc les tee-shirts composés de nylon.
"Ok, je me retrouve donc en fin de journée avec un tee-shirt dont les fibres sont chargées en déchets bactériens en tout genre. Un coup de machine à laver et c’est parti, non ?"
Eh bien cette question, nos chercheurs l’ont bien traitée aussi. Mais vous pouvez deviner la réponse vous-même à partir des caractéristiques du synthétique mentionnées plus haut.
Une caractéristique qui va particulièrement se manifester quand l’eau de votre machine va chercher à laver votre vêtement de ses microbes.
Vous l’avez trouvée ?
C’est bien l’hydrophobie : l’humidité corporelle ne sera pas le seul liquide rapidement rejeté par la matière. L’eau et la lessive peineront également à agir dessus.
Les fibres élastiques, telles que le lycra ou l'élasthanne constituent les cas les plus extrêmes d'hydrophobie. C’est pourquoi vos vêtements de sports composés de matière excessivement stretch seront les plus capricieux au lavage.
© Ce type de tee-shirt sèchera rapidement après votre séance de sport, mais les odeurs ne feront que s'accumuler au fil des lavages. (Crédit : Décathlon).
Ce type de tee-shirt sèchera rapidement après votre séance de sport, mais les odeurs ne feront que s'accumuler au fil des lavages.
Les fils de vos vêtements plastiques restent donc vaillamment accrochés aux huiles corporelles pleines de déchets bactériens, auxquelles viendront s’ajouter les différents agents chimiques qui auront tenté d’agir dessus au cours du lavage.
Aussi bien intentionnées soient-elles, les pratiques visant à économiser la consommation d’énergie telles que l’usage d’eau froide ou de machines limitant l'utilisation d’eau n’arrange rien au phénomène. Elles rendent la destruction des bactéries encore plus compliquée.
On peut bien entendu ajouter à l’ensemble de ces facteurs le fait que les vêtements synthétiques, contrairement aux matières naturelles, sont peu respirants et favorisent donc notre transpiration.
Tous ces facteurs ne font donc que s'accumuler.
Si j’étais vous, j’y réfléchirais à deux fois avant de prendre ce lot de cinq tee-shirts en polyamide pour passer la mi-saison. Ou l’été. Ou l’hiver. Bref, sortez de ce magasin.
Si vos vêtements synthétiques sentent donc encore après leur passage en machine, il n'est pas forcément trop tard pour eux : Benoît vous recommande cette lessive pour favoriser une meilleure élimination des bactéries à température égale.
LE SYNTHÉTIQUE TECHNIQUE, UNE SOLUTION MAGIQUE ?
Mais quel est donc le secret de tous ces sous-vêtements qui se disent techniques et nous promettent une vie sèche et sans odeur ?
Ils sont pourtant composés de matières principalement synthétiques. Ils devraient donc se comporter de la même manière en cas d’effort intense.
© Airism, la gamme bien connue d'Uniqlo, nous promet un été sans odeurs ni transpiration. Ce tee-shirt est pourtant composé de 94% de polyester et 6% d'élasthane. Quelle est la formule magique ? (Image : E-shop d'Uniqlo).
Airism, la gamme bien connue d'Uniqlo, nous promet un été sans odeurs ni transpiration. Ce tee-shirt est pourtant composé de 94% de polyester et 6% d'élasthanne. Quelle est la formule magique ?
Eh bien la plupart de ces marques utilisent tout simplement des agents chimiques qui attendent sagement nos bactéries malodorantes pour leur faire la peau. Il s’agira souvent d’agents à base d’argent, aux propriétés bactéricides.
Cela donne donc un vêtement stretch, sec et non-odorant, grâce à l’hydrophobie des fibres synthétiques et aux autres avantages qu’elles peuvent avoir. D’où l’offre abondante de ce type de matières dans le domaine du sportswear.
© Par exemple, la technologie de tissu Polygiene utilise des sels d’argent pour inhiber les bactéries malodorantes.
Par exemple, la technologie de tissu Polygiene utilise des sels d’argent pour inhiber les bactéries malodorantes.
Par exemple, la technologie de tissu Polygiene utilise des sels d’argent pour inhiber les bactéries malodorantes.
Cette pratique, certes efficace lors des premiers ports, présente cependant certaines limites :
- Leur efficacité baisse au fil des lavages
- Elle trouve aussi ses limites à partir d’une certaine quantité de transpiration
- Les biocides utilisés ne détruisent pas uniquement les bactéries malodorantes.
Ce dernier point est d’autant plus important du fait que les marques font de plus en plus appel aux nanoparticules.
Nico Boon, écologiste microbien à l’Université de Ghent, précise que ces biocides pourraient ainsi potentiellement impacter nos systèmes immunitaires.
En somme, on ne connaît pas assez précisément leurs effets à long terme. Même si pour l’instant, nous en sommes au stade du questionnement.
Côté environnemental, le chercheur spécialiste en nanomatériaux Eric Gaffet affirme qu’à partir d’une certaine concentration, les nanoparticules utilisées peuvent être néfastes à la reproduction d’espèces aquatiques. Elles peuvent également tuer des bactéries nécessaires au traitement des eaux usées.
Néanmoins, ce type d’impact dépendra tout de même des méthodes de fabrication engagées par une marque. Cela retombe donc entre les mains de leur eco-responsabilité et de leur gestion des déchets industriels qui engagent des problématiques allant bien au-delà.
© Ce soir, vous pourrez vous coucher en sachant à quoi ressemble une nanoparticule d'argent. (Image : National Institute of Standards and Technology - Wikipedia).
Ce soir, vous pourrez vous coucher en sachant à quoi ressemble une nanoparticule d'argent.
Comme nous le dit cet article de 60 millions de consommateurs, les nanoparticules sont donc dans le collimateur des organismes de contrôle. La réglementation européenne impose la mention du terme “nano” sur les produits. Une réglementation qui peut être esquivée passé un certain diamètre de particules, comme l’a fait la marque Uniqlo pour sa gamme Airism.
Une autre approche permet de limiter la transpiration et les effets négatifs liés à la constitution des fibres synthétiques : elle mise sur le tissage même et la manière dont la fibre est utilisée.
Ici, on est complètement sur autre chose : plutôt que de masquer les dégâts avec des biocides, la matière est étudiée en elle-même + pour régler le problème à la source, en optimisant la respirabilité et la ventilation au porté.
C’est le cas du tissus Gore Tex notamment, dont les pores sont étudiés pour être assez petits pour ne pas laisser passer l’eau mais assez grands pour évacuer l’humidité et la chaleur corporelle +.
© On ne vous présente plus la fameuse membrane imperméable préférée de Benoît. Enfin, si, je viens de le faire.
On ne vous présente plus la fameuse membrane imperméable préférée de Benoît. Enfin, si, je viens de le faire.
Polartec est également très connu pour exceller dans ce genre de technologies grâce à leur politique de recherche et développement : les gammes Power Dry et Power Stretch en sont de très bons exemples.
© Les tissus Power Dry disposent de deux couches aux fils de capilarités différentes. Celle qui sera en contact avec votre peau absorbera l’humidité, tandis que la couche extérieure séchera rapidement en la laissant se disperser.
Les tissus Power Dry disposent deétude du centre européen Reset (RESearch centers of Excellence in the Textile sector), les chercheurs nous montrent un aperçu du comparatif entre coton et autres fibres. Sur la ligne "Odour", on voit bien la différence marquante entre coton et polyester.
Et contrairement aux fibres synthétiques :
- Le coton n’est pas un aimant à bactéries malodorantes,
- Il n’est pas hydrophobe.
Résultat ? Des lavages bien plus efficaces, avec un gros score en bactéries tuées.
La contrepartie, notamment dans un cadre sportif, c’est qu’un tee-shirt en coton mettra plus de temps à sécher : la sensation désagréable liée à l’humidité risque de vous coller à la peau plus longtemps qu’avec un tee-shirt "dry fit" en plastique.
LE LIN, POUR UN ÉTÉ MALIN
Comme le coton, le lin est une fibre d’origine végétale, à la seule différence qu’il n’est pas issu d’une fleur mais de l’intérieur de la tige de la plante. On dit donc que le lin est libérien.
L’ensemble de ses propriétés relatives à l’humidité et aux bactéries seront donc assez semblables à celles du coton.
© Voici à quoi ressemble le lin avant d'atterrir sur votre peau. (Image : mastersoflinen.com)
Voici à quoi ressemble le lin avant d'atterrir sur votre peau. (Image : mastersoflinen.com)
Le lin absorbera l’humidité corporelle au même titre que le coton. Ce sont ses pectines hydrophiles, liant les fibres entre-elles, qui lui donnent cette capacité à absorber jusqu’à 20% de leur poids en humidité, sans changer de sensation au toucher.
Le tout, sans préservation exclusive de mauvaises bactéries contrairement aux fibres synthétiques. Puisque le lin a aussi des propriétés anti-bactériennes.
La fibre de lin sèche aussi assez rapidement.
Ces mêmes pectines rendent aussi le lin extrêmement thermorégulateur : suivant les conditions climatiques extérieures, cette matière vivante s’adaptera pour vous garder au chaud ou à l’inverse au frais.
Ici, contrairement au coton, ce n'est donc plus un simple coup de pouce mais un véritable atout pour la régulation de votre chaleur corporelle.
L’inconvénient, c’est que le lin est rêche. A même la peau, il vous grattera probablement plus que le coton mais restera excellent à porter en chemise, l’été. Car il laissera l’air passer entre votre peau et le tissu.
© Lorsqu'il n'est pas collé à la peau, le lin est une arme estivale redoutable (Chemise De Bonne Facture).
Lorsqu'il n'est pas collé à la peau, le lin est une arme estivale redoutable.
Mais si vous êtes douillet, à moins de monter en gamme pour aller vers des qualités de fibres et de tissages supérieures, je ne mettrais pas un tee-shirt en lin sous mon pull l’hiver à votre place. Une excellente alternative peut être un mélange coton-lin, donnant lieu à un tissu plus doux et moins froissable.
LA LAINE, INDÉTRÔNABLE REINE
La majorité des recherches ont abouti à une conclusion : à propos d'inhibition d’odeurs, la laine reste imbattable.
Elle montre une excellente capacité à absorber l’humidité sans laisser les bactéries malodorantes proliférer. Et cette absorption peut aller jusqu’à 35% de son poids !
Ensuite, elle laisse le tout s’évaporer tout en gardant le corps humain au chaud, même quand elle est mouillée.
Une autre étude néo-zélandaise mentionnée par le centre Reset a démontré que la laine retenait 66% d’odeurs de moins que le polyester et 28% de moins que le coton.
© Au cas ou mes tableaux et graphiques ne vous auraient toujours pas fait mal au crâne, voici le coup de grâce : pour chaque bactérie, la capacité d'inhibition de chaque matière. D'après l'étude, c'est la laine qui s'en sort le mieux en laissant chaque bactérie se développer correctement, sans faire de jaloux. Ainsi, elle absorbe le tout sans privilégier le développement d'un cocktail bactérien malodorant comme le fait le polyester.
Au cas ou mes tableaux et graphiques ne vous auraient toujours pas fait mal au crâne, voici le coup de grâce : pour chaque bactérie, la capacité d'inhibition de chaque matière. D'après l'étude, c'est la laine qui s'en sort le mieux en laissant chaque bactérie se développer correctement, sans faire de jaloux. Ainsi, elle absorbe le tout sans privilégier le développement d'un cocktail bactérien malodorant comme le fait le polyester.
La finesse et la constitution naturelle de la fibre de laine lui confère des pouvoirs magiques thermorégulateurs que l’homme a tenté de reproduire artificiellement pendant des décennies.
Et comme pour le lin, cette thermorégulation limitera les besoins de votre corps en évacuation d’humidité.
Que ce soit en amont ou en aval de ce phénomène de rejet de chaleur corporelle, la laine est donc ici notre championne. Avec en tête de course la laine mérinos, plus fine et donc plus souvent utilisée en base layer.
Et comme elle retient le moins d’odeur, ses lavages peuvent être moins fréquents que pour le coton ou le polyester. Un lavage qui sera tout de même plus contraignant, puisqu’il faudra entretenir votre pièce avec douceur, comme une maille.
Voilà donc pourquoi la laine mérinos est la grande favorite des randonneurs, des voyageurs, et de Benoît.
Pour un usage sportif, son temps de séchage reste tout de même plus lent de 50% par rapport au synthétique. Mais à ce prix, vous restez un cran au dessus en terme d’hygiène.
© Les chemises en 100% mérinos, ça peut se trouver aussi : ici, un modèle de chez Beni.
Les chemises en 100% mérinos, ça peut se trouver aussi : ici, un modèle de chezB
NE NÉGLIGEZ PAS LES COUCHES SUPÉRIEURES
Evidemment, ces conseils sont à prendre en compte quelque soit le "niveau" de la couche de vêtements en question.
Qu'il s'agisse de votre trench, de votre pull, ou de votre chemise, il est donc important de vous tourner vers des matières naturelles (ou techniques dans certains cas) pour ne pas rendre inutile votre investissement dans un t-shirt en laine à plus de 50€. Même si un vêtement d'extérieur synthétique porté sur un base layer naturel vaut mieux que la même combinaison avec un t-shirt en polyester.
LE MOT DE LA FIN
Vous l’aurez compris, le poly-pétrole ne sera pas sur le podium aujourd’hui.
Vous savez à présent pourquoi, si votre budget le permet, le base layer en mérinos reste un graal (rapidement addictif) en toutes saisons. Il est donc à la première place.
Pour les enveloppes plus restreintes, en seconde place, les pièces en 100% coton seront le meilleur compromis sous un layering.
Le lin est une excellente alternative, avec une meilleure thermorégulation que le coton. Mais il sera plus agréable sur une pièce ample l’été que coincé entre votre peau et un pull ajusté.
A présent, lorsqu'un ami vous demandera quelle composition de tee-shirt choisir, vous aurez une réponse pour le moins complète. Commencez tout de même par l'inviter à s'asseoir.