Parmi les sources d'inspiration récurrentes de la mode masculine, certaines semblent tout simplement intarissables tant on les retrouve encore et encore.
C'est le cas de l'inspiration militaire : depuis des décennies - voire même des siècles si l'on y regarde de plus près - les pièces portées par les forces armées n'ont cessé d'être réutilisées par les civils, d'abord pour des raisons pratiques, puis de style.
Je vous ai parlé du chino en septembre dernier, mais on pourrait aussi citer l'exemple du bomber ou même du tee-shirt, voire des bottines jodhpur !
Aussi, permettez-moi de vous présenter aujourd'hui la pièce qui, malgré son passage au statut de "classique" masculin, reste la plus indissociable de ses origines militaires : la field jacket M-65 !
Petit historique de la field jacket M-65
Vous vous rappelez peut-être de notre épisode de "Dans le vestiaire de..." avec Gauthier Borsarello ? Nous l'avions interviewé sur son métier d'expert du vintage et de chineur émérite.
Pour être certain de ne manquer aucune anecdote sur l'histoire de cette pièce aux racines très fortes, je suis parti discuter avec lui autour d'un café. Et après avoir bénéficié d'une leçon accélérée sur ses détails techniques, leur évolution et son ascension dans la culture populaire, je vous propose de partager avec vous ce que j'ai pu recueillir...
Une pièce fonctionnelle pour répondre aux exigences de l'armée américaine
"M-65" est l'abréviation de "Model-1965". Il est normal que la veste soit nommée d'après sa date de création : il s'agit de la version améliorée de deux générations successives de field jackets, la M-43 et la M-51.
Elle a donc été créée dans une démarche d'amélioration de l'équipement militaire, aboutie grâce à l'expérience des soldats sur le terrain. Sa conception a été confiée à Alpha Industries, plus grand fournisseur de l'US Army à l'époque, qui avait déjà créé la flight jacket MA-1 .
Le cahier des charges de cette field jacket ? Les troupes avaient besoin d'une pièce solide, polyvalente, confortable, fonctionnelle, et adaptée au climat extrêmement pluvieux et chaud de la jungle vietnamienne.
Ainsi, Alpha Industries a proposé à l'armée une veste dotée d'un certain nombre de caractéristiques techniques, que l'on retrouve d'ailleurs souvent sur les reproductions actuelles :
- un tissu "NYCO", nouveauté exclusive à l'armée à l'époque, mélange nylon-coton prévu pour résister au vent et à la pluie,
- une doublure amovible en ouate pour s'adapter aux temps plus frais,
- un cordon de cintrage interne,
- des pattes de boutonnage aux épaules, car un soldat a toujours besoin d'un point d'attache supplémentaire pour les nombreux objets qu'il transporte,
- quatre poches à rabat dotées de boutons-pression, plus rapides et faciles d'utilisation que les boutons classiques d'une M51,
- des extensions triangulaires rangées à l'intérieur des manches (grâce un système de velcro), pour couvrir les mains en cas de vent. Pratiques dans certaines situations précises, elles présentaient malgré tout quelques inconvénients au quotidien : il était très compliqué de porter la veste les manches retroussées, et le ressenti causé par ces rabats était assez désagréable autour du poignet,
- un col droit pour protéger le cou et y ranger une capuche repliable à l'intérieur.
Notez qu'il est aujourd'hui très rare de retrouver un exemplaire authentique qui ait encore sa capuche : du fait de son système de maintien lorsqu'elle était déployée, elle encombrait les G.I.'s sur le terrain et ne tenait pas vraiment bien sur la tête.
Par conséquent, la majorité décidait tout simplement de la découper. C'est peut-être le plus grand défaut de cette pièce dans sa version d'origine. (Ne vous en faites pas, on y a évidemment remédié sur la nôtre !)
Anecdote intéressante pour les collectionneurs : Gauthier m'a fait savoir que de 1965 à 1972, les zips étaient en aluminium, tandis qu'après 72, on s'est mis à les fabriquer en laiton. Sachez donc que si vous trouvez une M-65 en surplus, en fripe ou en brocante un jour, la première est beaucoup plus rare. Surtout en bonne condition !
Un symbole popularisé par le cinéma
Comme pour toutes les pièces d'inspiration militaire, la popularisation de la M-65 se déroule selon un schéma que l'on connaît bien : les vétérans reviennent du Vietnam accompagnés de leur fidèle M-65, faisant par la même occasion un "fashion statement" très badass, qui marque l'esprit des civils.
Parallèlement, l'armée a un très gros surplus à distribuer après le conflit, et l'entreprise qui a conçu la veste décide de se lancer également dans une production destinée au marché public.
Nous avons là les premiers éléments qui permettent à la M-65 de devenir accessible à la population, tant en termes de visibilité que d'achat.
Évidemment, c'est le cinéma de l'époque qui a fait la différence dans l'esprit des gens, propulsant la veste au statut de vêtement iconique.
Al Pacino dans Serpico ; Robert DeNiro dans Taxi Driver ; Sylvester Stalone dans Rambo "First Blood"... Des grands noms avec une puissante résonance dans la culture populaire, alors même que certains venaient tout juste d'accéder à la célébrité.
Compte-tenu de ses origines, la M-65 avait déjà une connotation forte. Mais dès lors qu'elle s'est retrouvée associée à des films et des acteurs en passe de devenir de véritables mythes, elle a fini par conquérir le public.
Une pièce détournée par les contre-cultures
Elle a également été réutilisée par de nombreuses contre-cultures et sous-cultures post-Vietnam aux États-Unis : des motards aux hippies "anti-war", en passant par les Black Panthers... Tous la customisaient, souvent à l'aide de peintures, broderies, pin's...
La symbolique est d'autant plus forte que ces groupes s'appropriaient des attributs militaires pour les intégrer aux codes de leurs revendications.
Pourquoi faire une M-65 ?
Après notre softshell en tissu technique, nous voulions revisiter la veste légère de mi-saison à travers des matières naturelles et des origines militaires assumées. C'est une influence chère à Benoît et à de nombreux membres de l'équipe.
Une belle M-65 permet de faire d'une pierre deux coups : elle apporte beaucoup de caractère à une tenue, tout en étant complètement intemporelle. Elle était d'actualité il y a 40 ans, elle le sera encore dans 10 ans.
C'est probablement son équilibre parfait entre esthétique et fonction qui lui a valu cette canonisation : malgré sa conception avant tout pratique, les lignes des 4 poches ont une certaine pureté qui donne presque involontairement à la pièce une dimension "sartoriale" décontractée.
Aux États-Unis, elle a aussi bien conquis les milieux urbains que ruraux. Et du fait de cette intemporalité, le style militaire peut souvent jouer le rôle de "pont" entre des pièces formelles et d'autres très casual.
De ce fait, on comprends facilement pourquoi une M-65 peut aussi bien être portée par-dessus une chemise casual légère ou un tee-shirt et des sneakers pour les beaux jours, que comme protection supplémentaire lors de l'automne, avec un blazer et des brogues. Voire carrément un costume "sport" !
Ses origines en ont aussi fait une pièce centrale pour tout style "baroudeur" qui se respecte : c'est la compagne idéale de l'aventurier, du photographe, du reporter, de l'amateur de longues balades en forêt et de voyages à travers le monde.
Une gabardine déperlante de la maison italienne Larusmiani
Une toile vert forêt, efficace contre la pluie
Dès le début du processus de création de la pièce, nous voulions partir sur une gabardine 100% coton avec un traitement déperlant pour vous protéger des pluies légères.
Par rapport au coton-nylon du modèle originel, c'est aussi un choix qui a l'avantage d'offrir encore plus de respirabilité, tout en gardant une certaine protection contre les éléments.
Côté couleur, nous nous sommes tournés vers une teinte vert forêt, à la fois masculine et facile à porter. La gabardine est aussi légèrement satinée et prend joliment la lumière, ce qui donne à cette M-65 un aspect un peu plus sophistiqué que de coutume.
Pour ce qui est de la doublure, il s'agit d'une 100% viscose. Douce et respirante, elle a aussi l'avantage de ne pas accrocher et elle a les propriétés respirantes du coton (c'est une fibre à base de cellulose). Parfait pour le layering.
Larusmiani, une filature habituée aux Maisons de luxe
C'est chez Larusmiani que nous avons trouvé notre bonheur...
Comme vous avez pu le voir dans la vidéo, Larusmiani - entreprise familiale vieille de trois générations - est très ancrée dans l'innovation. C'est ce parti-pris qui lui a permis de développer des tissus modernes et luxueux à l'époque où le prêt-à-porter se construisait , venant concurrencer l'hégémonie britannique.
Comme nous, Larusmiani est animée par une recherche perpétuelle de qualité. Ils créent d'ailleurs quelques vêtements haut de gamme, faits-main, qu'ils distribuent dans leur propre boutique. À ce jour, il s'agit de la plus vieille enseigne sur la célèbre Via Monte Napoleone , au coeur du quartier mode de Milan.
Une coupe et une esthétique modernisées
Toujours dans l'optique de vous proposer une pièce urbaine, nous avons opté pour une épaule lisse et bien dessinée qui soulignera votre carrure, plutôt que d'y placer les pattes de boutonnage habituelles.
La coupe est ajustée pile comme il faut, moins "loose" que ce qui se faisait sur les modèles d'antan.
Par ailleurs, nous avons joué avec les quatre poches à boutons-pression emblématiques de la M-65 : leur forme a été retravaillée avec une légère asymétrie sur le rabat. On crée ainsi des lignes diagonales, venant souligner le buste et marquer la taille.
Bien évidemment, les rabats bénéficient d'un solide point de renfort de chaque côté pour leur assurer une durabilité dans le temps.
Les détails, tout est dans les détails !
Une capuche qui ne vous fera pas défaut
Un travail spécial a été effectué sur la capuche pour la rendre aisément repliable.
Contrairement à celle des G.I.'s envoyés au Vietnam, elle est facile d'utilisation et entoure bien la tête grâce aux boutons-pression latéraux.
Vous n'aurez donc pas à la découper aux ciseaux par frustration, comme ils ont souvent dû le faire !
Des poignets à serrer selon votre convenance
Nous avons aussi repris les pattes de serrage à velcro circulaires de la softshell V2, pour s'adapter au mieux aux conditions climatiques et aux différentes façons de porter la parka.
Resserrez-les pour vous isoler en cas de mauvais temps et de coups de vent ; desserrez-les pour retrousser facilement les manches et la porter avec un tee-shirt lors des journées ensoleillées.
Autre détail hérité de sa cousine la softshell : des oeillets métalliques ont été posés aux aisselles pour améliorer la circulation de l'air.
De solides zips YKK
Nous avons fait le choix d'utiliser des zips noirs de la gamme Vislon© d'YKK, qui est l'offre "performante" de la marque, utilisée par les plus grands noms du techwear .
Ce modèle est doté d'un glisseur en métal pour la durabilité, et des dents dans un plastique choisi pour sa glisse parfaite. C'est une gamme réputée pour sa fiabilité et sa solidité.
La couleur complète bien celle de la gabardine, elle lui donne un petit aspect technique qui n'est pas pour nous déplaire !
Comme sur l'originale, un rabat à boutons-pression vient couvrir le zip principal en cas d'intempéries et vous protéger un peu plus. Il peut aussi être utilisé pour ne fermer la veste que partiellement, à la manière d'un blazer par exemple.
Un fit ajustable...
Un cordon de serrage interne vous permet d'ajuster le fit.
Vous voulez une taille très marquée pour un look un peu plus habillé ? Aucun souci. Plus de place pour vos superpositions de couches ? Ca marche aussi !