Interview de Laurent Blanc, fondateur de The Good Life
Nous avions déjà parlé du magazine The Good Life dans l’article : passage en revue de la presse masculine papier. Nous le qualifions alors comme étant le plus équilibré des magazines masculins. Vous allez voir qu’il en est tout autant pour leur modèle économique.
Les illustrations du magazine sont toujours très graphiques et soignées.
En plus de répondre aux évolutions actuelles des médias (offrir du physique et du numérique, et faire le rapprochement entre l'édition de contenus et la distribution de produits sous une même marque), le souhait de Laurent Blanc, fondateur de The Good Life, est de créer un univers complet qui dépasse les pages du magazine. C'est ce qu'il explique dans cet interview :
- évolution du format papier vers le numérique,
- modèles économiques à suivre,
- alternative à la rémunération publicitaire,
- avenir de The Good Life.
Retranscription de l'interview de Laurent Blanc :
Je suis Laurent Blanc et je suis fondateur des magazines « Idéat » et « The Good Life ». « Idéat », j'ai fondé le magazine il y a 15 ans. C’est un magazine de design en fait, d'architecture. Et « The Good Life » qui est un magazine lifestyle masculin que j'ai fondé il y a deux ans et demi.
Pouvez-vous nous présenter « The Good Life » ?
« The Good Life », c’est un magazine hybride qui est assez à la mode aujourd'hui, l’hybridité. On voit les voitures hybrides, on voit les appareils photos hybrides. Les gens même sont hybrides maintenant. Donc, il mélange deux genres qui normalement ne se mélangent pas dans les magazines, de l'actualité économique mondiale, globale. Donc, ça parle très, très peu de la France et beaucoup du monde économique qui avance et avec du lifestyle. Donc, mélange de mode mais aussi de choses un peu masculines, des voitures, des bateaux, mais aussi de la musique et même de la danse, de l’art contemporain. Et tout ça est mélangé de manière presque imperceptible. Il est hybride aussi sur la forme et hybride dans le fond. On l'a vu, mais il est aussi hybride sur la forme et donc hybride entre livre et magazine. En fait, il a le format d'un livre, le papier du livre mais le contenu d'un magazine. Il y a beaucoup de texte comme dans un livre avec de petites photos. Alors que dans les magazines, c'est plutôt les grandes photos et pas beaucoup de texte. Et donc, c'est ce mélange qui crée son originalité. Ce qui fait qu'à la fin, c'est presque un objet.
A qui s’adresse “The Good Life” ?
Ce magazine n'intéresse pas que les gens de plus de 50 ans qui ont beaucoup d'argent, mais qui intéresse aussi pas mal de jeunes. Notamment, on est très, très bien représenté dans les écoles de commerce, et ça, je trouve que c'est hyper rassurant. Donc, ce qui fait que les tranches d'âge vont d’étudiant type école de commerce à plus de 50 ans qui est installé dans la vie. Et ce mélange a l'air de bien vivre. C’est assez intéressant.
Que pensez-vous de l’évolution du format papier vers le numérique ?
Plutôt que de poser le numérique au papier, il se trouve que les lecteurs de « The Good Life » sont ultra connectés. Beaucoup plus que la moyenne. Donc, ça veut dire que les choses sont plus compliquées qu'on ne l'imagine. Vous voyez. On a tendance à poser le numérique et le papier. Et en fait, non, puisque nos lecteurs sont ultra connectés. Ça peut vivre ensemble. Ce n'est pas parce qu'on lit « The Good Life » en papier le week-end parce qu'il y a un côté un peu sensitif de toucher ce papier…. De toute façon, rien ne remplacera le plaisir de se mettre dans un bon fauteuil le samedi avec une petite tasse de café et de lire son magazine préféré. Il y a un côté sensitif. Ça n'empêche qu’évidemment, cinq minutes juste après ou avant, on peut aller sur sa tablette ou sur le net chercher des informations. D’ailleurs, c'est assez complémentaire puisque sur « The Good Life », on a des applications notamment avec des adresses d'hôtels et de restaurants dans le monde. Donc, tout est très complémentaire. On a une application qui s'appelle « The Good Spots » qu'on peut consulter, qui est une application gratuite et dans laquelle on peut si vous voulez partir – je ne sais pas moi – à Buenos Aires par exemple. Vous tapez Buenos Aires et on va vous donner nos trois meilleurs hôtels à Buenos Aires. Vous pouvez choisir votre chambre dans l'hôtel. Les restaurants dans lesquels vous pouvez aller avec un cadre qu'on aime bien, et puis les 3 ou 4 musées importants là. Et une fois que vous êtes à Buenos Aires, il y a même un système de géo localisation pour GPS pour pouvoir aller au restaurant, guidé par une tablette.
Dans l’évolution au papier vers le numérique, y a-t-il des modèles économiques à suivre ?
Le problème de tous ces éditeurs qui ont tendance à tout miser sur le numérique, c'est que la publicité sur le numérique se vend au kilo maintenant. Donc, c'est très compliqué de rendre les sites rentables aujourd’hui. Il faut investir beaucoup pour que ces sites soient magnifiques. Et en même temps, la publicité se vend maintenant de moins en moins chères parce que les acheteurs de ces publicités ou les agences qui achètent les publicités pour les annonceurs sont très attentifs au nombre de visiteurs et donc après, on arrive à acheter la publicité au kilo et la rentabilité est très difficile à obtenir en fait. Alors que pour la partie presse, c'est vrai qu'acheter de la publicité dans un magazine, ça coûte encore assez cher. Et puis, on n'achète pas uniquement en presse une diffusion, un nombre de lecteurs. On achète aussi la qualité d'un magazine, la qualité de son papier, son environnement, le fait qu'il soit glossy, luxueux et on achète un peu tout ça. C'est pour ça que les tarifs de vente de publicité en presse sont encore assez préservés en fait. Donc, le modèle économique est plus intéressant sur la presse que sur Internet.
Y a-t-il une alternative à la vente d’espace publicitaire ?
C'est ce qu'on fait avec le concept. Ça, c'est je pense que c'est une façon pour un éditeur papier. Moi, je suis un petit éditeur papier. Et pour un petit éditeur papier, je pense que la solution intelligente pour aller sur le net parce qu’évidement qu’il faut y aller, il faut y être, c'est d'y aller non pas en mettant son contenu papier gratuitement sur le net, mais plutôt de valoriser sa marque et d'aller sur le net pour faire du business. Par exemple, nous depuis deux ans et demi, trois ans, on a fait de « The Good Life » presque une marque parce qu’on vend un univers en fait. Et ça, ça nous a permis de lancer un site de e-commerce qui propose à un certain nombre de personnes qui vont sur le site de retrouver cet univers et d'acheter une partie de cet univers en achetant une maquette de bateau, une chemise, un tableau, une photographie d'un photographe connu, une mappemonde, un meuble contemporain signé par un grand designer du XXème siècle. Du coup, ils sont contents de retrouver cet univers en fait. En revanche, ça n'a rien à voir avec le magazine. Ce n'est pas parce qu'on présente un objet dans le magazine qu'on va pouvoir l'acheter sur l'e-shop. C’est le même univers mais il n'y a aucune corrélation. Le magazine reste un magazine, c'est du journalisme. L'e-shop reste un e-shop. C’est du commerce. Il y a un mur entre les deux. On ne fera pas de pont entre l'e-shop et le magazine.
Comment est représenté le secteur de la mode dans « The Good Life » ?
Ça fait partie intégrante du lifestyle, c'est une mode assez décontractée mais chic. Ce n’est pas ultra branché mais on a des marques comme Kitsuné, APC, Acné. Mais on a aussi du Tommy Hilfiger, du Ralph Lauren, du Marc Jacobs. Et c'est ce mélange un peu hétéroclite, cool chic qui fait que les lecteurs de « The Good Life » se reconnaissent dedans. Mais « The Good Concept Store » n’est pas un site de e-commerce spécifique sur la mode. La mode n’est qu’une partie de ce qu’il propose.
Quel est l’avenir de « The Good Life » ?
Alors si le site de e-commerce marche, on a vu qu'avec « The Good », ça commence à faire une marque puisque ça fonctionne bien. Dans deux ou trois ans, on essayera d'ouvrir une boutique physique dans Paris pour matérialiser le concept. Alors, une petite boutique mais dans laquelle on rentrera un peu tout l'univers qui est décrit dans le site de e-commerce. Et puis peut-être qu'après, un jour, on aura un restaurant qui s'appellera « The Good Kitchen ». Mais quand on rentrera dans une boutique qui s'appellera « The Good Concept Store » ou un restaurant qui s'appellera « The Good Kitchen », on rentrera dans l'univers du magazine. Ça commence à marcher de manière globale parce que le magazine « The Good Life » vient de sortir en version chinoise il y a quinze jours à Shanghai, et on est en pourparlers pour vendre une licence en Corée et en Allemagne aussi. Donc, c'est un concept qui se décline à l'international.
Interviewer : Merci beaucoup Laurent.
Oui, je vous en prie.
La convergence des médias et du e-commerce
Il y a quelques semaines, The Good Concept Store ouvrait ses portes : il s'agit d'un concept store en ligne qui propose des objets en adéquation avec l’univers du magazine papier. Vous pourrez donc y acheter aussi bien du bon vin argentin, qu'une maquette de Riva, ou des pièces iconiques du design moderne.
Là où c'est vraiment bien fait, c'est que les produits sont expliqués. Et que même sans acheter, c'est instructif et agréable de flâner sur les différentes fiches, notamment pour se faire une culture graphique.
Mais pourquoi assiste-t-on de plus en plus à cette convergence entre médias et sites e-commerce ?
Des revenus publicitaires de plus en plus réduits
Face à la concurrence de médias gratuits (en particulier numériques) souvent de grande qualité, et l'arrivée de sites avec des audiences de niche, forcément plus pointus que leurs prédécesseurs papier, les prix de vente des pages papier et des bannières baissent. Et donc les revenus de la presse traditionnelle aussi.
L'autre faiblesse de certains acteurs classiques, ce sont les rapports trop ténus qu'ils entretiennent parfois avec leurs annonceurs (= ceux qui achètent de l'espace publicitaire), ce qui nuit à la qualité des contenus, et aboutit à une désertion d'une partie du lectorat.
Face à ces deux phénomènes qui prennent les médias en tenaille, il est vital de trouver de nouveaux modèles économiques.
Un nouveau modèle économique qui émerge
Certaines nouveaux médias comme The Good Life se distinguent de leurs concurrents en misant à fond sur la qualité et la profondeur des contenus, mais aussi sur un support papier aussi beau qu'un livre, ce qui est un luxe pour un titre de presse.
C'est une stratégie efficace, démultipliée quand couplée à une autre grande tendance gagnante : le rapprochement entre médias et e-commerce.
En effet, le développement de marques, de contenus forts et d'expertises permet aujourd'hui à certains acteurs (comme The Good Life ou BonneGueule) de se diversifier avec beaucoup d'aisance, sans pour autant s'aventurer dans des secteurs inconnus.
Par exemple, pour The Good Life, reconnu pour ses capacités de curation (sélection des meilleurs sujets lifestyle, pièces de design, destinations de vacances, etc.), lancer un concept store de produits sélectionnée avec attention est une suite logique.
Et pour BonneGueule, communauté centrée sur l'explication de la mode masculine et des techniques textiles, lancer une marque de vêtements se posait également comme une évidence.
Mais ce n'est que récemment qu'il est devenu peu coûteux de diffuser des contenus et des produits. C'est ce qui rend possible ce phénomène de fond : les médias lancent des plateformes e-commerce, et les acteurs e-commerce s'éditorialisent à grande vitesse.
Un danger : redevenir juge et parti
Le seul danger, comme Laurent Blanc le souligne dans la vidéo, c'est de mélanger les genres. La partie média doit rester un média (par exemple, on ne peut pas être juge et parti en conseillant ses propres produits dans un article de conseil), et la partie commerce doit rester un commerce. Period.
C'est un gros point d'attention pour ces nouveaux modèles économiques qui ne doivent en aucun cas retomber dans les excès de leurs prédécesseurs beaucoup trop proches de leurs annonceurs (même si c'est normal d'en avoir pour des médias lifestyle).
Avis de l'équipe et sélection sur le Good Concept Store
Confiant dans la capacité de l'équipe à dénicher des trucs bien (et à les expliquer de manière drôle), j'ai proposé à chacun de sélectionner la pièce qui lui correspondait le plus. Vous allez voir qu'il y en a vraiment pour tous les goûts.
Certaines choses sont très accessibles, d'autres non. Mais l'idée c'est encore une fois de vous faire découvrir des choses et de vous sensibiliser au design.
Florian - Le confort
Ce "faucanap" (contraction du mot fauteuil et canapé) est un véritable appel à la détente : son style scandinave est minimaliste, mais pas banal (parfait pour déguster un bon verre d'Henri Bardouin en toute tranquillité). Et bien évidemment, il permet d'accueillir une deuxième personne car à deux, c'est toujours mieux.
À quand une collab' avec un motif pareil ? Une chemise me semble jouable 🙂
Nicolas - Le zen
J'ai choisi cette bouilloire de la fameuse marque de design transalpine Alessi pour l'ingéniosité de sa réalisation. Et je parle d'ingéniosité au sens technique. En effet, le design sert ici un rôle esthétique, mais surtout pratique.
Vous voyez ce bec verseur doré, imposant, qui semble avoir deux cheminées ? C'est là que cette bouilloire révolutionne le petit monde de l'accessoire de cuisine, car ce sifflet au moment de la sortie de la vapeur produit une mélodie, en mi et en si, courte et agréable tel un son de flûte (au lieu de l'habituel son angoissant de la bouilloire qui miaule).
Geoffrey - Le rêveur
Un de mes passe-temps de grand garçon pour lesquels je ne trouve plus trop de temps : la bande dessinée.
L'occasion de me refaire l'intégrale de XIII (pendant les vacances, j'ai le droit de me faire des trips associaux seul dans ma chambre face à mon ventilateur et un tas de bouquins, passés 30 degrés). L'histoire est cool et pleine de rebondissements : un mec se réveille amnésique avec une trace de balle dans le cuir chevelu. Le reste, ce serait du spoiler (et Benoît boude quand je spoile).
Plus artistique, ce livre chez Taschen (éditeur mythique sur la déco et les beaux arts) sur l'usage du bois en architecture et décoration d'intérieur. Tout à fait dans le ton de ce que j'aime en ce moment : des matières brutes et authentiques !
Benoît - Le prudent
J'ai été surpris de voir qu'il y avait même un extincteur jaune.
Et surtout, un bel extincteur, chose plutôt rare.
La particularité de cet extincteur, c'est qu'il fonctionne avec de la poudre. C'est le seul extincteur qui peut éteindre tous types de feu. Parfait si votre neveu débranche mal une prise électrique sur le tapis, pendant que votre pote rate son Cointreau flambé, alors que votre copine laisse tomber au même moment, par mégarde, la bouteille d'alcool à brûler dans le barbecue.
Et puis vous pourrez toujours dire que c'est un pote pompier qui vous l'a donné.
Alexandre - Le voyageur
Pour ma part, j'ai décidé de prendre l'avion et de traverser l'océan Atlantique Nord, pour atterrir finalement à l'autre bout des Etats-Unis : à Los Angeles précisément. Vous m'excuserez le peu d'originalité de mon choix mais il ne peut en être autrement.
Je n'ai jamais été là-bas, et je ressens un besoin pressant de me rendre sur Fairfax Avenue et de faire tous les magasins de streetwear qui s'y trouvent (l'avenue est réputée pour ça !) : Crooks and Castles, Supreme, Diamond Supply and Co pour ne citer qu'elles.
Au programme : achats de casquettes, de teeshirts et de hoodies pour revenir la valise pleine. Bien évidemment, j'en profiterai aussi pour aller bruncher avec Kim Kardashian.
Luca - Le mélomane
J'ai toujours rêvé d'avoir un objet design ayant un intérêt technique bien précis.
Ces enceintes Davone sont l'illustration même de mon caprice. Leur forme conique permet une dispersion sonore optimale à 360° (je rêve d'habiter dans un phare). Le caisson de basse (complètement isolé dans un compartiment) est orienté vers le bas, augmentant l'harmonisation sonore (donc totalement équilibrée).
Judicieusement placées dans votre living, elles éveilleront la curiosité des filles les plus sensibles et se chargeront de leur faire du bien aux oreilles (même si ça passe après les pâtes au pesto fait maison, on ne se refait pas).