“Je suis très instinctif. Quand je m'habille, je ne suis pas cérébral du tout." Difficile de dérober à Paul Binam la recette secrète de ses looks si personnels : il ne la connaît pas lui-même. On a quand même essayé (et réussi) à lui soutirer de précieux conseils stylistiques lors d’une rencontre improvisée dans son appartement parisien, enfoncés dans un canapé en velours, un matcha fait maison à la main.
Dans l'appartement parisien de Paul Binam.
Celui qui se décrit lui-même comme un “Brestois perdu dans la capitale” a signé pour BonneGueule une collection capsule de cinq pièces à son image, à découvrir le 25 novembre prochain sur l’e-shop et dans nos boutiques. Alors forcément, l’envie nous est venue de le questionner sur son rapport au vêtement, ses inspirations, ses goûts ou encore la méthode, s’il en a une, pour se concocter des tenues de caractère.
Suivi par plus de 100.000 personnes sur les réseaux sociaux, Paul Binam a réuni en seulement quatre ans une communauté de fidèles à qui il partage sa passion pour la mode. Une passion née à travers son regard d’enfant lorsque son père, “le fashionista de la maison”, partait au travail avec des costumes impeccables. “Tout est parti de lui”, nous a confié le trentenaire. “La mode, ça a commencé par un hasard, puis c’est resté en moi. J’ai suivi mon coeur."
A votre tour de suivre le vôtre.
1 - “Expérimentez, testez, évoluez”
“Mes goûts, mon style et mon intérêt pour la mode sont en constante évolution. Je suis passé par plusieurs phases stylistiques - et comme tout le monde, j'ai suivi la tendance. La tecktonik, c’est un style par lequel je suis passé - et je n’en suis pas fier ! Mais c’est aussi comme ça qu’on apprend. Cette époque m'a permis d'expérimenter avec les couleurs fortes et farfelues. Je m'amusais à les mélanger et bizarrement, ça marchait. C’est ce qui m'a entraîné à avoir un œil un peu différent."
“C’est bien d'essayer des choses. On est là pour apprendre.”
“A Londres, j’ai eu ma phase rock. J’écoutais les Strokes, le Velvet Underground, je traînais à Camden Town. J’ai eu un déclic niveau style : j’ai senti que j’avais la liberté de tout essayer. Du gothique, des piercings, du cuir, mes premiers tatouages… J’ai aussi commencé à cultiver un côté plus minimaliste et sombre. Puis, de retour à Paris, mes looks se sont assagis : j’ai cultivé une silhouette plus classique."
“Aujourd’hui, impossible de décrire mon style."
“J’ai toutefois deux lignes directrices : la première, c’est le vintage des années 70 à 90, du disco au hip-hop. La deuxième, c’est la mode contemporaine, pour les coupes et les matières. Je prends plusieurs éléments de plusieurs décennies différentes et je les mixe pour en faire mon propre style. Un béret et des bretelles d’une époque, un pantalon pattes d’eph d’une autre…”
Paul Binam et un portant de vestes, ses pièces favorites
2 - “Osez vous détacher du regard des autres”
“Parfois, les gens font beaucoup trop d'efforts pour être stylés - mais en vérité, c'est inutile. Avant, mon problème était que je me souciais trop de ce que pensaient les gens. S’habiller pour les autres, c’est vraiment la dernière chose à faire. J’ai vraiment commencé à aimer la mode quand j’ai commencé à m’habiller pour moi. Et depuis, je m’amuse tous les jours."
“Mon credo : fais ta vie, fais ton look, habille-toi comme tu le sens. Et tant que tu te sens bien, c’est le principal."
“Osez. Il faut s'en foutre, du regard des autres. Si vous croisez des gens et que ceux-ci vous regardent bizarrement, dites-vous qu’ils ont croisé votre route… deux secondes ! Ils ne savent pas qui vous êtes et vous ne savez pas qui ils sont."
3 - “Soyez en constante recherche d’inspiration (et pas que sur les réseaux sociaux)”
“On demande souvent où est-ce que je tire mon inspiration. La musique m'inspire. Celle des années 70, 80, 90, avec les clips à l’ancienne. Joey Badass, 2PAC, The Notorious B.I.G… Le cinéma aussi. Le Diable s’habille en Prada, c'est mon film préféré. Ma madeleine de Proust. J’aime aussi les séries des années 90 comme Friends, Le Prince de Bel-Air et Sex And The City."
“Ne cherchez pas votre style sur Instagram. Regardez des films, écoutez des sons qui vous plaisent et analysez les looks des artistes qui vous inspirent."
“Je m’inspire aussi en parcourant des livres de photos. J’ai découvert un photographe américain qui s’appelle William Eggleston : je suis fan. Il shoote à l’argentique. Dans ses images, je repère parfois des couleurs rétro que je trouve magnifiques, et qui se font moins aujourd’hui dans le vêtement. Quand je vois une teinte qui me plaît, je pars en friperie pour trouver un cardigan ou un blazer qui s’en rapproche."
Paul Binam en train de feuilleter un livre du photographe William Eggleston.
“Ce qui est très important aussi, c'est de savoir ce qu’on a dans son dressing, et d’avoir des pièces qu’on aime, qu’on connaît bien et qu’on sait comment porter. N’ayez jamais peur de reporter vos pièces et vos looks. Il faut rentabiliser vos vêtements, et les porter encore et encore."
4 - “Jouez avec les couleurs”
“La couleur, je n’en porte pas depuis longtemps. Quand on est enfermé dans une case, notamment sur les réseaux sociaux, c’est dur d’en sortir. On m’appelait "Monsieur Beige", parce que je portais beaucoup de beige, de marron, de couleurs neutres. C’était très monotone. J’avais peur de quitter ce côté très minimaliste alors que la couleur, j’en rêvais. Durant les confinements, j’ai commencé à en porter, mais seul chez moi. Et j’adorais ça. Au fil du temps, j’ai eu envie d’assumer d’en porter à l’extérieur, parce que ça m’amusait et que ça me rendait hyper heureux. J’ai eu le déclic."
“Les couleurs, ça va à tout le monde. Il faut juste oser."
“Les gens ont peur de porter des couleurs parce qu'ils ont peur de se déguiser. Mais moi, je pars du principe que la couleur, c’est pour tout le monde. Pour démarrer, il faut juste bien connaître sa carnation, les différentes teintes de couleurs qui nous vont, et s’amuser avec."
5 - “Pensez à la praticité avant de miser sur les détails”
“La première chose que je fais avant de m’habiller, c’est de regarder la météo. C’est elle qui va décider de ma tenue du jour. S’il fait moins de 10°, je fais un gros layering, ou bien je sors une grosse pièce. Selon si je suis à vélo ou pas, je vais choisir des chaussures qui ne glissent pas, un manteau pas trop long au risque que celui-ci ne s'accroche à mon vélo… S’il pleut et que je prends mon vélo, je sors une parka. J’ai des bottes de pluie ? Je vais les porter. C'est pas forcément les produits les plus stylés, mais je vais faire en sorte de les rendre stylés."
“Mon style, il est avant tout 100% pratique."
“Parfois, je porte des tenues qui sont franchement chiantes. Mais il pleut, il fait froid, et j'ai la flemme. Je réfléchis donc à comment rendre l’ensemble moins désagréable, et ça passe juste avec des détails. Les détails, ça change tout, tout, tout."
© BonneGueule
“J’ajoute des boucles d'oreilles vintage, une montre, des bagues, un chapeau, un foulard, un sac… C’est avec les accessoires que je commence à vraiment créer mon style : ils apportent une autre dimension à une tenue, et de la personnalité. Ensuite, c'est la manière dont je pense mon layering : je peux m'amuser à mettre un manteau à l'envers ou bien un pull par-dessus. Comment tu enfiles une chemise ? Comment tu noues un foulard ? Comment tu fais le revers sur un pantalon, comment tu retrousses tes manches, comment tu relèves le col d'un blazer ? Encore une fois : il faut s'amuser."
“Je me mets devant mon miroir et je me demande : “qu’est-ce que je peux faire de nouveau aujourd’hui ? C’est comme ça que j’arrive à nourrir et réinventer mon style."
“Il faut commencer petit à petit, essayer des choses, voir ce que tu aimes ou pas, et intégrer ce qui te plaît à tes tenues, au fur et à mesure."