Si je voulais tant aller au Pitti Uomo, c'était pour rencontrer ce fameux style italien que l'on voit partout sur les Tumblr.
C'est un salon bien différent du Tranoï ou du Capsule (et encore plus du salon Who's Next), car l'art sartorial y est représenté avec beaucoup plus d'honneurs, bien qu'il y ait une multitude de petits créateurs présents.
Les grandes marques ont également une belle représentation : j'ai par exemple été très surpris de constater que Zanotti avait un énorme stand, moi qui pensais que le côté clinquant de la marque était à l'opposé du salon.
J'expliquerai dans un prochain article ce qu'est exactement ce salon et les marques que j'y ai découvert. Mais aujourd'hui, je vais m'attarder sur les looks des acheteurs et exposants présents, car c'est ce qui vaut le détour.
En effet, la plupart des photos d'hommes stylés que vous rencontrez sur les tumblr, ceux avec des vestes et des chemises de folie, sont généralement prises au Pitti Uomo. C'est ce qui en fait un rendez-vous incontournable de l'élégance masculine.
Je parle bien d'élégance, car les tenues présentes n'ont rien à voir avec certaines bizarreries de modeux que l'on croise chez Colette pendant la fashion week. Il y a certes des tendances bien visibles, mais tout est masculin et de bon goût (vous ne trouverez pas de casquette de Spartiate au Pitti par exemple).
Vous imaginez donc ma curiosité le matin du premier jour, quand Nicolas et moi marchions d'un pas ferme vers la fameuse fortezza di Basso, lieu emblématique où se tient le Pitti.
Les tenues du Pitti Uomo
Nous sommes ainsi arrivés. Et au fur et à mesure que les visiteurs rentraient, il était clair que l'on se trouvait dans l'endroit où il y avait la plus forte de concentration de personnages stylés... au Monde !
Est-ce que certains messieurs se pavanent délibérément au centre du salon ? Oui, ça ne fait aucun doute. Et il est amusant de remarquer que certains sont tout le temps au téléphone, quand d'autres prennent une attitude faussement décontractée en bougeant lentement, avec un sourire constant sur le visage.
Certains feignent d'ignorer les photographes, mais se placent bien en évidence dans les allées, tandis que leurs camarades se prennent au jeu avec plaisir et tapent la pose. On pourrait y trouver un côté artificiel, mais personnellement, je trouverai bien dommage de voir cet évènement uniquement sous cet angle.
Au contraire, on sent que les gens sont contents d'être là, et ont envie de tenter des tenues qu'ils n'auraient jamais l'occasion de porter ailleurs (allez porter un costume blanc pour vous rendre au travail, vous allez voir).
Il y a une bonne humeur et un bouillonnement créatif palpable. On ne se sent jamais regardé de haut, et on apprécie ce côté spectacle (il est assez déroutant de remarquer que les photographes sont à l'extérieur de l'évènement, et ne prennent aucune photo des marques présentes).
C'est donc avec un oeil très affûté que j'ai analysé le style des Italiens, et que j'ai dressé ses principales caractéristiques avec leur faisabilité en France. Vous avez toujours rêvé de ressembler à un Italien travaillant dans la mode ? Les 10 points ci-dessous vous concernent !
Et toutes les photos qui vont suivre sont de BonneGueule.
1. Le style italien et l'usage de la couleur
Faisabilité en France : il va falloir vous y mettre.
Comme le dit Luca, les Italiens sont très à l'aise avec le vêtement. J'ai le ressenti que là-bas, savoir s'habiller est une qualité masculine valorisée, contrairement à la France.
Les hommes italiens sont donc encouragés à se distinguer. Se faire remarquer est quelque chose qui n'a pas l'air de les impressionner, à l’inverse de certains Français qui font tout pour avoir des tenues ordinaires, et ne surtout pas être voyant.
Après une France traumatisée par des années "bling bling", on comprend aisément pourquoi les Français réclament de la discrétion vestimentaire. Ce qui frappe le plus concerne l'usage de la couleur. Le noir est quasiment absent (normal pour une période d’été), et les teintes (très) claires sont largement utilisées.
Ne pas porter une couleur "parce qu'elle est trop claire" paraît être quelque chose d'invraisemblable en Italie. Le pantalon blanc semble être une pièce indispensable du vestiaire italien estival, car au Pitti, il était systématiquement assemblé avec une veste et une chemise.
Autre point dont nous ferions bien de nous inspirer : la couleur des vestes. Si en France (et même en été), les deux grandes couleurs pour les vestes sont le bleu et le gris, les teintes des blazers de ces messieurs sont bien plus riches et joyeuses, et vont du kaki au bleu lagon.
2. L'usage de la couleur... sur les chemises du Pitti Uomo
Faisabilité en France : on le fait déjà, mais en moins riche sur les textures et les matières.
Il est assez étonnant de voir que les couleurs de chemises sont toujours très sobres et servent de base neutre pour construire les tenues, comme un tableau blanc qui n'attendrait que des coups de pinceaux colorés.
Il n'y a quasiment que du blanc et du bleu en chemise, mais déclinés dans d'infinies textures, matières et nuances : chambray, lin, voile de coton, popeline, etc.
Mais ce n'est pas parce que les chemises sont blanches qu'elles se confondent avec celle de monsieur tout le monde. Pour y ajouter de la singularité, les finitions sont impeccables : la plupart des hommes ont des boutons de chemise montés en zampa di gallina (cette manière de coudre les boutons est aussi appelée fleur de Lys ou patte d'oie), des coutures anglaises fines et raffinées, et ce fameux col italien très évasé qui se place si bien sous les revers de la veste avec ou sans cravate.
Dernier détail qui m'a surpris sur les chemises aperçues au Pitti Uomo : la rigidité des cols. Il semble qu'avoir un col relativement mou (un peu comme ce que peut faire G. Inglese) est signe d'une décontraction italienne de bon goût. J'ai vu tellement de cols de ce type bien portés que cela m'a définitivement réconcilié avec les cols souples, que j'associais autrefois à des chemises de qualité cheap.
3. Les contrastes de style en cascade
Faisabilité en France : un grand OUI.
C'est la caractéristique principale du style italien. Ils sont très doués pour mélanger parfaitement l'élégant et le décontracté. Il y a toujours un petit truc inattendu dans leur tenue. Ils peuvent porter un costume impeccable... avec une pochette fantaisiste.
Les Japonais étaient extrêmement bien habillés, mais avec moins de flamboyance. De ce que j'ai vu, ils connaissent et récitent parfaitement leurs gammes d'art sartorial. Pas de prises de risque insensées, mais une maîtrise des codes de l'élégance absolument parfaite, enrobée d'un perfectionnisme typiquement nippon.
Ce sont des hommes d'une grande classe, et leurs tenues sont impeccables. Point final.
4. La suprématie totale des pièces tailleurs dans le style italien
Faisabilité en France : totalement encouragée, depuis le temps qu'on vous dit que la veste bien coupée est un impératif du vestiaire masculin !
Cela m'a frappé : les pièces tailleurs (costumes, blazers, vestes) règnent en maître au Pitti Uomo. Il peut faire plus de 30°, j'ai l'impression qu'un Italien stylé ne sortira jamais sans sa veste.
Cela m'a d'ailleurs été confirmé plusieurs fois : canicule ou pas, tout le monde est en costume. Les coupes sont systématiquement impeccables et les vestes parfaitement cintrées. Et bien sûr, la plupart arborent fièrement une boutonnière milanaise sur le revers de la veste...
Bien souvent, ce sont les épaules souples, dites napolitaines, qui dominent. Ce qui donne une silhouette plus naturelle et plus confortable, car l'épaule suit les mouvements du porteur.
Cela permet d'atténuer le côté trop strict et structuré d'un costume classique. On pourrait même croire que c'est LE type d'épaule destiné à la veste décontractée.
5. Le cas de la veste croisée
Faisabilité en France : on y vient peu à peu.
Oubliez les blazers croisés à boutons dorés de votre grand-père, la vérité est ailleurs.
Effectivement, les Italiens se sont merveilleusement appropriés ce vêtement qui souffre d'une image poussiéreuse en France. Mais pas chez nos amis transalpins, où les vestes croisées sont courtes et parfaitement cintrées. Il faut bien avouer que cela donne une sacrée prestance à une tenue, et ce n'est pas Hugo Jacomet qui dira le contraire.
En effet, les deux rangées de boutons dessinent subtilement une carrure en V bien masculine. Et très franchement, c'est en essayant une veste croisée de chez Ly Adams de l'été prochain que j'ai eu un petit déclic.
Par contre, une veste croisée ne se porte pas n'importe comment : il y a un peu d'imagination pour bien la placer dans une tenue.
Mais une inconnue demeure : à quoi ressemblent toutes ces vestes croisées quand elles sont ouvertes ? C'est ce qui me freine un peu avec ce type de veste, qui peut vite tenir trop chaud en été : vous avez quand même deux épaisseurs de tissu au niveau du ventre.
Mais là aussi, Hugo a son mot à dire sur les vestes croisées en été.
J'espère que vous appréciez le voyage autant que moi. Nous verrons les cinq derniers points dans le prochain article !