Je ne dirais pas que je suis un aventurier. Mais quand il s'agit de trouver des astuces pour allier l'éthique à mon budget, je ne refuse pas non plus une expérience. Et là, nous allons parler de lunettes.
Tout ce que je connais de cet univers, ce sont les Kirk Originals en parfaite condition.
Le reste, c'était de la science-fiction jusqu'à ce que je me décide à prendre rendez-vous chez un ophtalmologiste. Il faut savoir écouter son corps : l'âge, la fatigue des yeux et les maux de tête peuvent bien vite devenir gênants.
Le verdict n'a donc pas traîné : 43 ans, 10/10 à chaque œil mais tout de même, "une petite paire de lunettes pour le travail ou la lecture vous feront du bien, vous verrez".
OK. C'est ainsi qu'un tout nouveau monde s'est ouvert à moi : celui des lunettes et des opticiens. Inutile de vous dire qu'on a vite fait d'être perdu. Alors, que faire ?
Eh bien pour ma part, j'ai principalement fait confiance à mon instinct. Bien sûr, j'aurais pu suivre le conseil de l'ophtalmologiste : consulter des opticiens, faire le tour des boutiques, essayer mille paires et me laisser conter fleurette sur l'esthétique ou le bien-fondé de telle ou telle option.
Mais allez savoir pourquoi, cette perspective ne m'enchantait pas particulièrement. J'ai donc opté pour une autre voie.
Je n'y connais donc pas grand-chose en lunettes de vue, mais il y a tout de même une marque en particulier qui m'intéresse depuis quelque temps : c'est une maison anglaise réputée qui s'appelle Cutler & Gross. Fun fact : Jordan en a déniché une paire lui-aussi, mais de manière plus... traditionnelle.
De mon côté, je note aussi que le musicien Jarvis Cocker est un client régulier de la marque, et c'est un petit détail qui me plaît. Le hic, c'est que les lunettes Cutler & Gross coûtent cher.
C'est ici que l'aventure commence. Vous l'avez sans doute remarqué : on trouve désormais de tout en ligne et d'occasion, des vêtements bien sûr et aussi des lunettes. Mon idée est donc relativement simple : trouver une monture qui me plaît, la faire ensuite ajuster à ma vue par un opticien. Le pari est en apparence risqué. Et pourtant...
Vinted, Videdressing, Le Bon Coin, etc. Les sites ne manquent pas. Avec de la chance et de la patience, je trouve finalement en ligne une monture Cutler & Gross d'occasion à la fois simple et stylisée pour la modique somme de 30€. Ce que j'achète ici, c'est une paire de lunettes de soleil avec des verres semi-teintés qui en coûte à l'origine environ 300.
Je sais cependant qu'il est possible que la paire ne m'aille pas, qu'elle soit abîmée ou tout simplement pas à ma taille. Je n'ai aucune garantie de résultat, mais quelque chose en moi me dit que ça en vaut peut-être la chandelle.
A réception, miracle : la paire me va bien. C'est la première fois que je tiens une paire de lunettes haut de gamme entre mes mains. Pas d'ajustement à prévoir sur la monture si ce n'est peut-être resserrer un peu les branches et bien sûr changer les verres.
Me reste donc à trouver un opticien pour réaliser l'opération. J'habite à Paris depuis plus de 10 ans maintenant et pourtant je raisonne toujours comme si j'habitais dans mon village de Mayenne. C'est une étrange habitude, qui fait que je me déplace le plus souvent dans un périmètre restreint.
Autour de chez moi, il y a des opticiens partout : Optic 2000, Lissac, Optical Center, etc. Il n'y a peut-être pas autant d'opticiens que de coiffeurs mais tout de même, toutes ces options me laissent perplexe et me font d'une certaine manière penser à cet article de David. Le paradoxe du choix, vous connaissez ?
Si j'ai choisi dans un premier temps l'option "seconde main", c'est justement parce que je n'avais pas très envie de faire le tour des popotes et de me lancer dans des comparatifs interminables. Non, en matière d'achat, j'aime assez tout ce qui a trait au coup de cœur et à l'engagement. Autant continuer.
C'est alors que je me souviens d'une devanture qui se trouve dans l'immeuble en face du mien, précisément à quelques pas seulement de la porte de mon médecin traitant. Vous commencez peut-être maintenant à mieux saisir ce que j'entendais tout à l'heure par "esprit village" : mon restaurant de prédilection pour les copains est dans la rue parallèle à la mienne, mes cinémas préférés et mon médecin aussi donc, etc.
Ce n'est pas de la flemmardise. J'aime surtout la proximité des choses, et comme vous le savez peut-être, je dois aussi mesurer mes pas pour des raisons médicales. Il y a donc une certaine forme de cohérence à ce que je décide de m'orienter vers l'opticien le plus proche de chez moi, d'autant plus qu'il est indépendant et qu'il défend donc une certaine vision de son métier.
Mon projet est-il réalisable ? Va-t-il me conforter dans ma démarche de "recyclage" ou m'orienter vers sa propre gamme de lunettes ?
Ce que je note dans un premier temps, c'est qu'il soigne l'accueil et qu'il a pour ainsi dire l’œil : ma paire de Cutler & Gross l'interpelle et il l'examine avec curiosité. J'ai soudain l'impression d'avoir en face de moi le Benoît de la lunette, qui va lui aussi me parler d'un truc qui le passionne.
Et effectivement, son expertise est passionnante. La paire est viable, le projet tout à mon honneur et oui : "on pourra tout à fait utiliser cette paire et lui adjoindre les verres dont vous avez besoin". Je suis content - il ne m'en coûtera que la pose des verres et je serai en partie remboursé.
Mes lunettes sont prêtes quelques jours plus tard. On fait quelques essais, je note des recommandations diverses et variées et je rentre à la maison. J'ai désormais des lunettes de vue et ma première question c'est bien de savoir si cela va modifier mon style. Bizarrement, je n'y avais pas pensé avant.
J'échange à ce sujet avec une amie. On en vient à parler de Jarvis Cocker, et on s'en amuse presque : "tu devrais essayer de le contacter et lui demander quelques conseils de style ou ses tenues préférées pour aller avec des lunettes". Il faut parfois savoir laisser venir les choses à leur rythme. Cette idée refera peut-être surface plus tard.
En attendant, je m'amuse avec ma nouvelle tête, je compose parfois des tenues exprès autour et j'essaie surtout d'être discipliné : c'est bien beau d'avoir de belles lunettes, mais maintenant il va s'agir de les porter régulièrement. C'est un autre genre de défi, mais je suis déjà bien content d'avoir tenu le premier.