Benoît Carpentier (Marchand Drapier) est un créateur que j'apprécie beaucoup, tant pour sa marque (inspirée par les voyages, les années 30, et... ses découvertes dans les marchés aux puces), que pour sa personnalité. C'est en effet quelqu'un de très ouvert, avec un vrai sens du partage, et qui nous a donc appris énormément de choses sur son métier de créateur, mais aussi sur le choix des matières (sa famille était marchand d'étoffes sur 3 générations), ou sur son rapport avec l'art. Il nous a même filé un coup de main sur le fameux projet Starship !
Benoît Carpentier m'ayant proposé de nous faire découvrir le marché aux puces, on a donc sauté sur l'occasion pour en faire un article. Car peut-être que comme moi, vous avez déjà visité les Puces de Saint-Ouen sans rien oser acheter d'un peu onéreux, de peur de vous faire avoir.
Ou alors, vous avez peut-être du mal à distinguer ce qui peut avoir un intérêt de ce qui n'en a aucun, "au milieu de toutes ces vieilleries", dans des marchés aux puces plus petits.
Les Puces de Saint-Ouen, qu'est-ce que c'est ?
Je vis au Nord de Paris, pas très loin des Puces de Saint-Ouen, où je me promène souvent. Sous ce nom se cache un ensemble hétéroclite de commerces, qui vont des vendeurs à la sauvette aux marchands d'art hors de prix, en passant par les chiffoniers, les fripes militaires et les vendeurs de meubles des années 60. Le tout formant le plus grand marché aux puces d'Europe : rien que ça.
Ce que vous y trouverez va des trucs très moches et très inutiles, aux choses belles et utiles, en passant par le utile et moche, et également des trucs inutiles, mais jolis... je vous laisse juger :
-> Un lieu riche en couleurs (marché Serpette).
-> Un jeu de verres d'opticien pour évaluer la vue des patients.
-> Une des échoppes spécialisées dans la culture pop.
-> Tout un habitat futuriste des années 60,
une sorte de soucoupe volante totalement équipée. Également en vente.
-> Benoît prend un air distant, sérieux et concentré, pendant sa visite
de la nouvelle boutique L'Eclaireur des Puces de Saint-Ouen.
-> Le genre de trucs impossibles à intégrer dans un intérieur moderne
que les touristes russes et chinois s'arrachent.
Les puces sont un endroit qui m'a toujours énormément intrigué, depuis que je vis à Paris. Je prends souvent plaisir à y aller en été, en visitant les stands au hasard, et parfois en ramenant chez moi un vieux meuble ou une décoration sur lesquels j'ai eu un coup de coeur.
Et c'est en visitant le bureau de Benoît Carpentier que j'ai découvert que ce qui est une curiosité pour moi, s'avère être une véritable passion pour Benoît : il se rend aux puces à peu près tous les mois, que ce soit à Saint-Ouen, ou aux Puces de Vanves ou Montreuil, plus modestes et plus populaires.
Nous allons donc tenter de vous offrir un nouvel éclairage, pour que vous puissiez vous aussi, en plus de passer un bon moment dans cet endroit haut en couleur, faire de belles affaires. Afin de meubler et décorer petit à petit votre intérieur à votre image, comme des tenues bien personnelles que nous vous aidons à construire au fil des mois...
Le point commun entre Marchand Drapier et les Puces de Saint-Ouen
Pour la curiosité, j'ai demandé à Benoît Carpentier de nous montrer ses meilleures trouvailles, avec si possible les créations de vêtements qui en découlent. Il m'a envoyé deux photos où on voit bien que ce qu'il a acquis aux puces s'est matérialisé dans son travail :
Benoît Carpentier : "J'ai trouvé ce lot de col smoking du XIXème siècle dans un vide-grenier (en haut à gauche). Et cela m'a donné envie de retravailler ce col en jouant avec un "carreaux" casual. Le résultat est top, c'est du formel déjanté et cool à porter, avec une veste de smoking, un denim brut et une paire de sneakers blanches".
Benoît Carpentier : "Ici, c'est une sculpture du Plis Français, haute de 2 m, et chinée à Saint-Ouen, qui m'a inspiré ce col. J'ai ensuite commencé à faire des origamis avec mes tissus, et le résultat a été très concluant."
Comment faire de bonnes affaires au marché aux puces ?
Bien souvent, une des deux parties (le vendeur ou l'acheteur) ne connait pas précisément le prix de l'objet, à ses dépens. Il y a donc énormément de bonnes affaires à conclure dans les marchés aux puces, pour peu qu'on soit du bon côté de la barrière. C'est ce qu'on va vous expliquer ici.
1ère étape - Se faire l’œil avant d’acheter
En premier lieu, il faut se forger une certaine culture des objets. Pour cela, n'hésitez pas à vous balader dans des marchés aux puces haut de gamme, comme chez les antiquaires de Saint-Ouen (marchés Dauphine pour ses jolies gravures à l'étage, Biron pour les antiquités haut-de-gamme, Paul Bert et Serpette pour les puces plus récentes comme les meubles du XXème siècle, ou encore Vernaison pour du bric et du broc plus accessible).
À visiter, en sachant qu'il sera difficile (mais pas impossible) de faire de bonnes affaires chez des antiquaires.
En effet, ces vendeurs sont de vrais professionnels et connaissent leur métier. De plus, ils s'adressent en général à une clientèle internationale fortunée (les Puces de Saint-Ouen étant la 4ème destination touristique d'Île-de-France en nombre de visiteurs). Mais c'est par contre un excellent endroit pour vous faire l'oeil, pour repérer des objets qui vous plaisent, pour imaginer comment s'intégreraient certaines pièces dans votre intérieur.
Bien sûr, les Puces de Saint-Ouen représentent un certain extrême. D'autres marchés bien plus accessibles existent : Vernaison à Saint-Ouen, mais aussi les Puces de Vanves et Montreuil, ou tout marché et brocante qui s'organise dans votre ville ou le village d'à côté.
Geoffrey : J'ai découvert Pierre Paulin, un des principaux designers français, en échangeant avec des antiquaires de Saint-Ouen. Lors de mes visites, j'avais également repéré son fameux bureau emblématique CM141 que je trouve magnifique, mais absolument hors de prix, que ce soit en original des 50's, ou en réédition.
Mais j'aimais vraiment son côté très graphique avec les pieds en acier mat, et l'opposition entre le bois qui réchauffe l'ensemble et le mélaminé vintage (rien à voir avec la mauvaise réputation actuelle de ce matériau). Bref, je le voulais vraiment. Un seul obstacle infranchissable pour mes modestes économies : un prix affiché de 4.500 € pour une édition originale (cher cher cher, même s'il faut voir ça comme une antiquité qui a 60 ans, et non le comparer au prix des bureaux de chez Ikea).
2ème étape - Ne pas hésiter à parler un maximum avec les antiquaires
Quand des objets vous intéressent, il est temps d'entamer quelques conversations avec les tenants des lieux. N'hésitez surtout pas, car ils aiment partager leur savoir. D'autant que ce sont de vraies mines d'informations, ils se sont construits une énorme culture sur le type d'objet dont ils font commerce. J'ai par exemple appris beaucoup de choses sur le mobilier des années 60 et 70 en discutant avec les boutiquiers des deux allées du fond du marché Serpette à Saint-Ouen.
Demandez aussi les prix, ce n'est pas tabou, aucune raison d'être timide même en étant "débutant". L'occasion de vous rappeler encore que c'est pareil avec les sapes : posez plein de questions quand vous êtes face à un vendeur compétent et ravi de partager ses connaissances.
3ème étape - Se mettre en embuscade... et attendre
Il est à présent temps de vous mettre en embuscade...
Si je devais dresser un parallèle avec l'apprentissage de la mode masculine, découvrir Saint-Ouen est un peu comme visiter des boutiques haut-de-gamme sans rien acheter, juste pour vous faire une culture des qualités de matières, de textures et de vêtements très bien coupés. Les autres marchés étant quant à eux le milieu et l'entrée de gamme, où on trouve parfois les mêmes objets / qualités à des prix beaucoup plus compétitifs. L'essentiel étant de s'être suffisamment exercé pour débusquer les bonnes affaires quand elles se présentent à vous. Et de ne pas vous fourvoyer dans ce qui semble en être une, à votre perte.
Autre marché riche en bonnes affaires pour les antiquités : Internet. Eh oui, des sites comme eBay (FR et US), ou le bon coin, fourmillent de bonnes affaires si vous faites preuve de patience, tapi derrière votre écran. Armé de la référence de votre objet, écumez ces sites, et faites des offres en dessous de votre estimation de la valeur de l'objet : il y a toujours un moment où un vendeur accepte par manque d'acheteur, ou parce qu'il veut se débarrasser rapidement d'un objet.
Note : Et si vous souhaitez enchérir au lieu de proposer directement des offres aux vendeurs, attendez les 15 dernières secondes de mise en vente de l'article pour enchérir avec votre prix max. Technique de ninja qui vous évitera d'entamer des surenchères couteuses avec les autres personnes intéressées par l'objet.
Vous pouvez aussi enchaîner les vide-greniers et autres petites brocantes. Vous trouverez peut-être un objet très proche du vôtre (voire cet objet précis) à un prix complètement dérisoire...
Mais dans tous les cas, quand vous achetez quelque chose qui coûte pas mal (au-delà 500 €), demandez des certificats d'authenticité (exemple : le même bureau Pierre Paulin ne vaut pas le même prix s'il date des années 60 ou si c'est une réédition contemporaine), ou des factures de ventes aux enchères si l'objet a été précédemment acquis ainsi.
Geoffrey : À force d'écumer tous les mois les sites de petites annonces pendant 1 an, en contactant tous les vendeurs, j'ai fini par trouver mon bureau pour moins de la moitié du prix demandé aux Puces de Saint-Ouen (pourtant cohérent avec la cote moyenne de l'objet).
Geoffrey : Au-delà du coup de coeur, cela m'a permis de placer un peu d'argent (ô douce époque où mes économies n'étaient pas investies dans BonneGueule). Un achat aussi bas sous la cote m'assurera également une plus-value le jour où j'aurai besoin d'un peu de sous. La chaise et la lampe ont également été chinées pour pas plus cher que le haut-de-gamme de Ikea. Bonus authenticité : +10.000.
4ème étape - Fréquenter des marchés aux puces moins professionnels
Une fois que vous vous êtes bien fait l'oeil, que ce soit en termes de décoration d'intérieur, ou en termes de connaissance des prix, enchaînez les vide-greniers, les braderies, et les marchés aux puces plus populaires, comme par exemple les Puces de Clignancourt, aux portes de Paris.
Vous y trouverez des prix plus accessibles, des vendeurs non professionnels plus disposés à lâcher leurs biens pour une bouchée de pain, et surtout vous vous extirpez ainsi de la concurrence des touristes et autres fortunés, qui font gonfler les prix à Saint-Ouen.
Les Puces de Vanves, bien moins professionnalisées.
Sachez aussi que dans tout marché aux puces, du prestigieux marché Biron à celui qui se tient annuellement dans ce petit village où vous avez passé vos vacances, tous les prix se négocient. Avec courtoisie bien sûr, mais en négociant toujours, tout de même.
Bien entendu, ayez toujours une idée du prix de l'objet, cela va de soi.
Et comme pour les vêtements, n'achetez pas des choses dont vous n'avez pas besoin (combien de vêtements inutiles se trouvent dans votre penderie, si vous découvrez notre site depuis peu ?). Quand on attrape un peu le virus des puces, on a vite fait d'acheter beaucoup de choses, surtout quand ce n'est pas cher. En conséquent, achetez petit à petit, chaque achat doit compter et réellement apporter quelque chose. C'est encore plus vrai si votre surface intérieure est modeste (je vis moi-même dans un petit appartement parisien), car les objets vous encombrent vite et vous limitent dans vos futurs achats.
Quelques exemples de bonnes affaires que vous pouvez réaliser aux puces
Vous pourrez littéralement trouver tout et n'importe quoi dans un endroit comme les Puces de Saint-Ouen. Je ferai l'impasse sur les oeuvres d'art hors de prix, sur les commodes Louis XIV et sur les fauteuils de style Empire, car ils ne concernent finalement que bien peu de monde (en plus d'être bien difficiles à intégrer dans un intérieur, chez quelqu'un qui a entre 18 et 40 ans, l'âge moyen du lecteur BonneGueule).
Mais vous pouvez aussi trouver...
Un bureau de style industriel... increvable.
Très cher à Saint-Ouen, mais à la limite du gratuit quand vous êtes au bon endroit, au bon moment.
Des étagères Tomado : c'est coloré et ça tient des années...
Compter une centaine d'euros sur le Net...
ou quelques dizaines d'euros si vous vous débrouillez bien en brocante.
Des German Army Trainers, les sneakers des étudiants
qui coûtent 30 € pour ceux qui en ont marre des Converse.
Une lampe Tizio originale, pour environ 80 €.
Des chaises de designers (ici Eames). Pour tous les prix...
De vieilles pubs des années 50. Et c'est le cadre qui vous coutera le plus cher...
Et une sculpture d'ours du sculpteur Pompon, si jamais vous avez 100.000 € en poche...
Et une envie de tout claquer (il s'est vendu à ce prix là quand on était aux puces samedi dernier).
Merci à Benoît Carpentier de Marchand Drapier d'avoir passé cette journée avec nous, et à Luca (toujours pas de S) pour s'être levé un samedi matin, pour prendre des photos avec du fish and chips plein les doigts.