Fan de la marque Carhartt depuis mes années collège et ma période skater, je suis toujours aussi fou en découvrant chaque nouvelle collection.
C'est justement ce qui est fascinant : Carhartt est une marque qui a su évoluer au fil du temps (notamment avec le lancement de la ligne Carhartt WIP, nous y reviendrons un peu plus tard) et qui m'a donc accompagné tout au long de ma "jeunesse".
Bien entendu, j'ai mûri et mon style a évolué. Cependant, j'achète toujours des pièces Carhartt.
Ce test est l'occasion de revenir sur ce qu'est réellement le style workwear, et de retracer l'évolution de cette marque. Je terminerai cet article par le test Carhartt de 3 pièces de la collection printemps/été 2014 que j'ai sélectionnées sur l'eshop Menlook.
Le style workwear : de la solidité, du confort et de la fonctionnalité
Le workwear a connu un véritable essor à partir de 2008. Peut-être suite à la récession en Occident, qui a poussé les gens à devenir plus pragmatiques et à rationaliser leurs dépenses.
Avec la baisse de leur pouvoir d'achat, ils commencent à consommer la mode différemment, et vont à l'essentiel : il leur faut des vêtements simples dans lesquels ils se sentent bien et qui les accompagneront durant plusieurs années. Autrement dit, les gens veulent à nouveau des basiques, solides, fonctionnels et sans prise de tête. Une victoire du pratique sur l'esthétique.
Photo tirée du lookbook Carhartt automne-hiver 12
(ligne Héritage, encore plus haut de gamme, mais rare en Europe).
Pour ma part, j'ai toujours privilégié le confort à l'esthétisme et croyez-moi, cela donne naissance à de vifs débats dans l'équipe, notamment avec Benoit qui me répète souvent : "Alexandre, ton teeshirt n'est pas à la bonne taille, regarde la couture de l'épaule !" ou bien "Alexandre, ce pantalon est trop large, regarde le volume de matière sur le bas de la jambe !".
De fait, si j'apprécie autant le workwear, c'est que le confort est un des piliers fondamentaux de ce style. Les coupes sont amples et les matières utilisées participent à cette sensation de confort (qui ne se sent pas bien dans un teeshirt ou une chemise en laine ?).
Ainsi, le style workwear correspond à de nombreuses morphologies. Pas besoin d'avoir une taille mannequin pour enfiler sa chemise en flanelle de laine, un teeshirt ou un jean brut.
La solidité et la fonctionnalité sont aussi des caractéristiques de ce style. En effet, le style workwear s'inspire des vêtements d'ouvriers et de paysans. Des gens pour qui le vêtement est un instrument de travail qui les accompagne au quotidien et ne doit pas les trahir. Les marques workwear se doivent donc de proposer des pièces solides et fonctionnelles.
Avec ce genre de publicité, le workwear est à sa quintessence.
Mais ce que j'aime avant tout dans ce style c'est la liberté d'expression qu'il offre aux gens. Ici, les codes de la mode sont bouleversés : on met un teeshirt sous sa chemise (chemise qu'on peut porter oversized), on fait un gros ourlet sur son jean pour qu'il remonte bien au-dessus de ses workboots...
Que la chemise soit du 7 points au cm importe peu, que la tête de manche soit positionnée exactement sur l'os de l'épaule non plus. L'essentiel est de se sentir bien dans ses vêtements.
Voilà un exemple de tenue workwear parfaitement maîtrisée.
Crédits photo : The Sartorialist.
Attention, il ne s'agit pas non plus de faire n'importe quoi ! Les règles d'association des couleurs et de superposition des matières sont toujours à respecter ! L'oversized a par exemple ses limites : oubliez le baggy et le tee-shirt avec la manche qui se termine au coude. Enfin, les amateurs de workwear ont une vraie sensibilité produit : ils aiment les belles matières et les belles finitions.
Les amateurs de workwear aiment les toiles
selvedge japonaises avec un point de chaînette.
Oubliez le style "100% bûcheron" et faites la part des choses
(Luca sans S m'a récemment avoué porter ce type de polaire en pleine saison hivernale...).
Vous n'êtes pas obligés de vous habiller entièrement en workwear et pouvez tout simplement introduire une pièce dans votre tenue. Cela peut être une chemise bûcheron, un jean brut, ou une grosse paire de Redwings pour commencer : n'hésitez pas à y aller touche par touche.
Carhartt: du vêtement d'ouvrier de chantier à la ligne Carhartt Work In Progress
Aujourd'hui, vous voyez souvent dans la rue des hommes et des femmes avec un beanie (=bonnet) Carhartt de ce genre :
Ne me demandez pas le numéro de cette demoiselle,
elle ne fait pas partie de l'équipe BG
(et la photo n'a pas été prise dans notre quartier préféré du Sentier).
Un bonnet devenu en peu de temps un accessoire de mode (note de Geoffrey : et qui disparaîtra sans doute assez rapidement aussi). Mais derrière ce simple bonnet, il y a une marque pionnière dans le style workwear : Carhartt.
L'histoire de Carhartt
Carhartt a été créée en 1889 par Hamilton Carhartt à Détroit dans le Michigan (aujourd'hui le siège social se trouve à Dearborn). À la base, c'est une marque spécialisée dans le vêtement de travail à destination des ouvriers de chemin de fer. Depuis 1830, la ville de Détroit connait un boom industriel important avec l'implantation de nombreuses usines (dont la mythique usine d'Henry Ford, d'où sortira la Ford T). La ville est même surnommée "Motor Town" ! Beaucoup de manufactures s'y installent pour profiter de sa position géographique avantageuse, car elle est située sur la voie navigable des Grands Lacs.
L'usine Ford aujourd'hui, à Dearborn, dans la banlieue de Détroit.
L'activité débute dans un grenier avec quatre machines à coudre et cinq employés. Le premier vêtement produit est une salopette en denim et en coton canevas (appelé aussi "duck" en anglais, de l'allemand "doek"). Malheureusement, les débuts sont difficiles. Hamilton revoit donc sa copie et décide de s'associer à un ingénieur ferroviaire afin de développer le produit ultime : une salopette résistante, confortable et fonctionnelle, disponible elle aussi en denim ou coton canevas.
La salopette Carhartt reste encore aujourd'hui un grand classique
pour tous les workers (disponible pour moins de 70 dollars !).
On voit bien l'aspect pratique avec les genoux renforcés,
les poches, et la largeur des jambes pour pouvoir s'accroupir.
Hamilton met un point d'honneur à offrir de bonnes conditions de travail à ses employés et à s'engager auprès des syndicats. Les produits sont ainsi estampillés "Union Made" et "Craft with pride in the U.S.A." . La qualité des produits et la stratégie marketing repensée avec le slogan "Honest value for an honest dollar" permettent aux ventes de décoller. Toute une gamme de vêtements de travail va voir le jour.
Casquette d'ouvrier ferroviaire avec le label "Union Made"
(crédit photo: www.vintageworkwear.com).
Essor européen de Carhartt
En 1994, la marque commence à s'exporter en Europe sous le label "Work In Progress". L'Europe découvre donc une petite sélection de produits Carhartt issus de l'offre workwear américaine. Le succès est fulgurant et en 1997, le label Work In Progress est fondé avec une première collection, disponible exclusivement en Europe.
Cette collection "Carhartt Work In Progress" voit le jour sous licence. Carhartt garde donc un oeil sur ces collections et veille à ce que ses valeurs (durabilité, confort, fonctionnalité) soient toujours respectées. Des collections avec des coupes repensées (plus travaillées et plus proches du corps), avec plus de diversité dans les matières, et des pièces tout simplement adaptées à un style de vie urbain.
Collection Carhartt WIP (automne-hiver 12).
Collection Carhartt WIP (printemps-été 14).
Aujourd'hui, il y a donc une véritable séparation entre le vêtement de travail et la ligne Work In Progress (disponible depuis peu seulement au USA). Work In Progress a collaboré avec de nombreuses marques référentes. Ma collaboration préférée est celle avec la marque A.P.C.
Sur cette collaboration, le "C" de A.P.C.
est remplacé par le logo Carhartt.
Test de la marque Carhartt Work In Progress
Pour réaliser ce test, j'ai choisi quatre pièces : une parka, une chemise oxford, un chino beige et une ceinture. L'idée était de montrer une tenue complète. Pour ma part je pense qu'on peut tout à fait s'habiller workwear sans pour autant être assimilé à un bûcheron barbu.
Note de Geoffrey : on a attaché Alex contre sa volonté
pour lui raser sa barbe, mais il a réussi à s'enfuir.
Le chino Carhartt Club Pant (beige, 95 euros)
Le chino est un basique du vestiaire masculin. Il vient suppléer votre jean brut. Personnellement, tous mes chinos sont de la marque Carhartt : j'aime la coupe, la matière et leur solidité (je porte encore des modèles achetés il y a 4 ans).
De plus, Carhartt propose à chaque nouvelle collection une large gamme de coloris et de coupes. Pour ce test, je porte un chino Club (coupe droite), dans une armure de twill 100% coton de 9 oz.
Je le porte avec des sneakers hautes Nike + A.P.C.
Le chino aurait mérité une petite retouche sur la longueur de jambe (on voit bien le tissu s'entasser sur la sneaker). Cependant, j'aime bien l'effet visuel que provoque ce volume de matière en trop (éternel débat !).
Enfin des poches profondes ! Idéal pour y glisser son smartphone 🙂
(on aperçoit le bout de mes doigts sur le fond de la poche)
Des poches passepoilées bien finies
(les deux bords sont de même hauteur et bien plats !)
Que ce soit bien clair : le chino Carhartt n'a rien d'exceptionnel (j'apprécie quand même les finitions et détails propres). Mais je sais que dans plusieurs années, et ce même après plusieurs dizaines de lavages, le pantalon ne bougera pas et la couleur restera bien fixée. Un excellent rapport qualité-prix (notamment disponible sur Menlook).
Je porte la ceinture tressée Parker (55 euros, disponible ici). Elle est en 100% polyester avec des empiècements/finitions en cuir. Cela faisait longtemps que je cherchais une ceinture en cuir tressée et celle-ci remplit parfaitement son rôle !
La chemise en oxford Carhartt Clink (79 euros)
J'ai choisi la chemise Clink en oxford bleu 100% coton. Je trouve la couleur parfaite, car elle s'associe aussi bien avec un jean brut qu'avec un chino. La coupe est très bonne (Benoit a même validé la taille !).
Je porte toutes mes chemises en dehors du pantalon donc je fais très attention à leur longueur (voir article sur la ici.
La couture des épaules est à la bonne place 🙂
(note : Benoit exige maintenant que tout le monde déboutonne le deuxième bouton en partant du haut, y compris pour les velus du torse).
Pour ce prix, les boutons sont en plastique.
La chemise a deux poches plaquées avec des points de renfort bien marqués. Comme vous pouvez aussi le voir sur les photos, les piqûres contrastent bien avec la matière (on a du 5 points au cm, ce qui est normal pour une chemise casual de ce type).
Au niveau des épaules et de la tête de manche, trois lignes de piqûres viennent renforcer la solidité de la pièce.
Je trouve le rapport qualité-prix correct, mais ne vous attendez pas à une qualité de tissu oxford incroyable (je trouve le tissu un peu rêche).
La piqûre est nette et régulière : c'est sobre et propre.
Détail sympa : la pocket pen qui permet de glisser un stylo !
On a ici une vraie belle hirondelle de renfort.
La parka Carhartt Mason Jacket (199 euros)
Simple d'apparence, cette parka se révèle plus complexe qu'elle n'y paraît.
Elle est à 100% popeline de coton bien épaisse (et la capuche est doublée). Un tissu sur lequel a ensuite été appliqué un traitement "wax" (pour obtenir une toile cirée). Cela rend le tissu hydrofuge.
Le processus d'hydrofugation est une opération d'apprêt qui a pour but de rendre les articles textiles non mouillables par l'eau tout en restant perméables à l'air (pour ne pas transpirer en dessous). Pour l'avoir testé en conditions réelles, la parka Carhartt Mason vous maintiendra sec sous une pluie fine, sans plus.
Dès lors que la pluie s'intensifiera, pressez-vous de vous mettre à l'abri, car c'est loin d'être aussi efficace qu'un tissu imperméable (ou mieux : déperlant).
La coupe est bonne : ni trop slim, ni trop large. On peut facilement glisser une grosse épaisseur en dessous. Une fois boutonnée jusqu'en haut et resserrée en bas avec le noeud, on se sent vraiment isolé de l'extérieur ! Les manches sont même ajustables au niveau des poignets.
Les quatre poches plaquées à rabat sont très pratiques pour y glisser portefeuille et autres cartes de transport... Les poches du bas sont divisées en deux emplacements : le premier accessible facilement sur le coté, et le second par le haut en déboutonnant la poche.
Finitions appréciables : la boutonnière
est renforcée par une bande en coton.
Tous les boutons sont en résine. Pratiques, les boutonnières sont en œillets : cela permet de les ouvrir et de les fermer facilement (même à une main !).
Boutonnière en œillets qui se reconnait
à son élargissement sur une des extrémités.
Dernier point important sur cette parka : la ventilation cachée sous un empiècement du dos, avec intérieur mesh (les photos parleront à ma place).
Le mesh est un matériau technique qui permet une meilleure ventilation et régulation de la chaleur (il est souvent utilisé pour des vêtements de sport).
Ici on voit bien le mesh.
Je trouvais le prix de cette parka un peu élevé. Cependant, après un rapide tour d'horizon de l'offre, c'est un des meilleurs rapports qualité-prix que j'ai trouvés, donc elle reste très honnête pour son niveau de qualité. Elle est disponible ici.
Conclusion du test Carhartt Work In Progress
Carhartt est une marque avec un excellent rapport qualité-prix, qui propose de supers basiques. Elle allie avec succès les trois piliers du workwear :
- La solidité : les pièces vous accompagneront longtemps et ne bougeront pas au lavage.
- Le confort : je suis à l'aise dans toutes mes pièces même fittées (bien entendu, les adeptes du extra slim auront du mal à trouver leur bonheur).
- La fonctionnalité : toutes les pièces sont bien pensées (poches, boutonnières à oeillets, ventilation mesh...).
Et rassurez-vous, le port de la casquette n'est pas obligatoire 😉