Je suis certain qu’en lisant le titre, vous vous êtes demandés : « S.E.H qui ? »... et ça tombe bien ! Je vous présente aujourd’hui cette petite marque anglaise injustement méconnue.
Disclaimer : Après un article sur comment s'habiller lorsqu'on est petit et fin, Jonathan - fidèle lecteur et contributeur - est de retour dans nos colonnes. Cette fois-ci, c'est à S.E.H Kelly et son vestiaire qu'il s'intéresse. La parole est à lui !
Interview de Paul Vincent, co-fondateur de S.E.H Kelly
Paul Vincent et Sara Kelly sont le duo fondateur de la marque S.E.H Kelly. J'ai demandé à Paul de répondre à quelques questions pour en savoir plus sur leur projet. Gentiment, il retrace pour nous leurs parcours respectifs, la genèse de la marque et son évolution.
Vous le verrez, S.E.H Kelly est plus qu’une simple marque de vêtements. C’est un projet mûrement réfléchi, avec la qualité et la production locale comme obsessions. Malgré des coûts élevés et un développement très progressif, rien ne semble faire dévier les fondateurs de leur vision initiale.
"Je m'appelle Paul Vincent et nous sommes, avec Sara (Kelly), les fondateurs et uniques propriétaires de S.E.H Kelly. Nous sommes basés à Londres et concevons des articles pour hommes avec des filatures et manufactures installées exclusivement dans les îles britanniques."
Comment en êtes-vous venus à créer votre marque ?
Sara a travaillé plusieurs années sur Savile Row pour des tailleurs et des maisons de couture - le genre d'ateliers qui fabriquent des vestes d'intérieur pour des lords, des costumes trois-pièces pour des magnats de l'industrie ou encore des robes de bal pour la famille royale.
Une place stratégique en somme, puisqu'elle a établi de bonnes relations avec quelques manufactures britanniques haut de gamme.
À la fin de cette période - qui correspondait pour moi à une époque où je me tournais les pouces en me demandant ce que j'allais faire de ma vie – nous avons décidé qu'il serait judicieux d'utiliser les mêmes fournisseurs pour concevoir des vêtements décontractés, portables au quotidien.
C’est ainsi que l’histoire de S.E.H Kelly a débuté...
Quelle est la philosophie de S.E.H Kelly ?
Elle est simple : faire un vêtement durable. Par "durable", nous entendons robuste, indémodable et intemporel du point de vue du design.
Pourquoi avez-vous nommé votre marque S.E.H Kelly ?
Kelly est le nom de Sara, et S.E.H sont ses initiales (sauf une, que nous gardons secrète). Nous avions essayé de trouver un bon nom à la marque quand on l’a créée, et Sara avait préparé une grande liste de propositions.
Nous avons convenu ensemble que la plupart manquaient de relief, et ma première contribution en tant que chef de marque fut de lui proposer d'utiliser son propre nom. "Pourquoi pas?" a-t-elle répondu...
Quelle serait une tenue S.E.H Kelly typique ?
L'ensemble le plus "signature" commencerait avec une chemise col Kelly, agrémentée d'une profusion d'autres vêtements S.E.H Kelly couvrant tout le corps (pieds exceptés).
Nous destinons nos vêtements à former une garde-robe polyvalente et interchangeable, de telle sorte qu'un habit acheté aujourd'hui puisse se marier avec un habit acheté il y a cinq ans.
De quelle pièce êtes-vous le plus fier ?
Le trench-coat... C'est le plus compliqué, celui qui a demandé le temps de conception le plus important. Il résume à lui seul ce que nous souhaitons accomplir en termes de design.
Il est très traditionnel dans sa construction et ses proportions - il reflète à cet égard un design vieux de cent ans - mais il apporte en plus des particularités que nous espérons utiles et contemporaines.
Pourquoi travaillez-vous exclusivement avec des ateliers britanniques ?
Un principe fondamental de notre entreprise est de travailler avec les fabricants des îles britanniques. Ce sont les fournisseurs que nous connaissons le mieux. Nous avons des relations privilégiées avec eux et un désir, à notre petite échelle, d’en faire profiter un public plus large.
Cela nous satisfait entièrement et nous ne regardons jamais ailleurs. Je suis convaincu qu'il pourrait exister de bonnes possibilités pour travailler avec des fournisseurs étrangers - différents styles de confection, d'autres catégories de produits, une variété inimaginable de tissus - mais nous ne sommes tout simplement pas intéressés car ils n'ont aucun lien avec notre entreprise.
Quel est votre mode de collaboration ?
Nous ne "collaborons" pas avec eux à proprement parler : nous travaillons avec eux selon le schéma classique designer-fournisseur.
Nous coopérons avec des filatures pour créer de nouveaux tissus, ou imprimer de nouvelles couleurs sur des tissus existants, et avec des fabricants de boutons ou autres pièces façonnées en exclusivité pour notre entreprise.
Day 3 of the Heavy Woollen Odyssey.
De plus, nous échangeons quotidiennement avec les manufactures partenaires pour nous assurer que l'idée de départ se retrouve dans le produit final.
Nous avançons main dans la main avec nos fournisseurs de telle sorte que nous savons ce qu'ils font, comment et pourquoi. Cela nous permet de réévaluer constamment les opportunités qui s'offrent à nous pour améliorer sans cesse nos produits.
Quel est votre avis concernant le secteur de l’industrie britannique du textile de nos jours ?
Il est solide, varié et en bonne santé. Il y a des petits et des grands designers qui s'adressent à toutes les catégories sur le marché et une formidable variété de fournisseurs - spécialement les tisserands et en particulier les filatures de laine.
Je ne prétends pas que ce soit une analyse irréfutable mais c'est mon opinion, sachant que je suis un peu plus informé que le profane et un peu moins qu'un expert.
Quels sont les inconvénients de produire au Royaume-Uni ?
Je n'en vois pas. C'est notre vie. Ce serait comme demander "quels sont les inconvénients de vivre en Europe ?" ou "quels sont les inconvénients de s'appeler Paul ?".
Nous ne voyons pas nos vies de cette façon-là. Nous prenons le bon et le mauvais ensemble, mais nous ne les séparons pas en colonnes pour les analyser.
Nous sommes au Royaume-Uni en tant qu'entreprise et nous n'avons pas encore trouvé de raison d'aller voir ailleurs.
Pourquoi votre marque est-elle principalement distribuée au Japon ? Le consommateur japonais a-t-il quelque chose de plus que le consommateur européen ?
Nous avons été contactés par des boutiques japonaises de qualité juste après la création de l'entreprise. C'est un pays où il existe un créneau important, en plein essor, qui s'accorde avec ce que nous aimons : de bons fabricants, plus des designs à la fois traditionnels et progressistes.
Je ne crois pas que seuls les clients japonais partagent notre vision, mais ils sont sans doute plus nombreux là-bas qu'ailleurs dans le monde. Preuve en est : regardez le nombre de magazines au Japon traitant de la mode masculine.
Ils encouragent aussi les petites marques et sont très fidèles. La grande majorité des magasins japonais avec lesquels nous travaillons collaborent avec nous depuis la première saison, et je sais que certains clients ont économisé pour acheter des vêtements S.E.H Kelly depuis tout ce temps-là.
C'est un privilège de travailler dur pour leur faire honneur et les garder en tant que clients.
Concernant votre communication, quel est l’intérêt d’utiliser Instagram plutôt que d’autres canaux ?
Nous utilisons beaucoup Instagram, et je pense qu'on aurait tort de s'en priver vu les millions d'utilisateurs quotidiens.
De la même manière, nous sommes sur Facebook, Twitter, Tumblr et l’excellent Google+. Je ne peux pas imaginer ne pas m'en servir.
Chaque réseau a ses avantages et ses inconvénients, mais cela rend ma journée intéressante : j'ai un moyen simple pour exprimer ce que j'ai dans la tête ou montrer notre univers.
The workshop. Today. Today being a day in June. Umbrella not shown.
À l’heure de l’instantané, pourquoi vos newsletters sont-elles uniquement écrites et ne comportent aucune photo ?
Les mots sont bons. Les mots sont géniaux. Ils sont capables de communiquer des pensées et des opinions d’une façon particulière, ce que la photographie ne permet pas.
Dans les emails que nous envoyons, nous pouvons partager avec nos clients les idées que nous avons eues, les choses qui nous ont occupés les semaines précédentes...
Ainsi, nous encourageons la "conversation" à l’ancienne sur un format "je dis quelque chose, tu réponds quelque chose". Nous préférons cette idée à celle de l'utilisation de termes marketing ultra-modernes.
Encore une fois, la variété est importante dans mon travail. Quand une foule de mots traversent mon esprit pour parler d'une pièce qui m'a occupée des centaines d'heures, pouvoir les exprimer est une chose salutaire. C'est peut-être une forme de thérapie...
Quels sont vos plans pour le futur ?
Rendre la collection plus forte à travers un meilleur design, un meilleur tissu, une meilleure fabrication.
Nous sommes heureux de travailler en duo et de faire chaque jour exactement ce que nous voulions faire quand nous avons démarré dans le métier il y a sept ans.
Nous n'avons aucune envie de nous « développer » dans le sens business du terme.
Un jour, quelqu’un m'a dit "Vous savez ce qu'on dit sur le business ? On dit "croître ou mourir"". Depuis, j'essaye de prouver qu'il avait tort.
Que retenir de cette interview-fleuve ?
L’histoire de S.E.H Kelly est celle de ses fondateurs. Après quelques expériences dans le secteur textile, ils s’associent en 2009 pour créer un projet qui leur ressemble. Le tout avec une seule idée en tête : mettre en valeur l’industrie textile britannique.
S.E.H Kelly fait appel à des ateliers spécialisés, exclusivement britanniques et irlandais. Malgré des coûts de production plus élevés que dans d’autres pays, ils y achètent leurs tissus, les fournitures et y font réaliser la confection.
Leur but est de fabriquer des pièces classiques de grande qualité, alliant design casual moderne et savoir-faire historique.
Avertissement sur le made in the UK : une pièce fabriquée au Royaume-Uni n'est pas nécessairement une pièce de qualité. Les standards britanniques garantissent une fabrication « éthique » mais aucunement la qualité d’un produit. Tout l’enjeu pour une marque haut de gamme qui choisit de fabriquer localement est donc de sélectionner avec soin les ateliers passés maîtres dans une spécialité pour obtenir un produit final de la meilleure qualité possible.
La marque revendique une idée d’intemporalité dans ses collections. Pour ce faire, elle utilise des matières brutes qui se patinent avec le temps, crée de nouvelles pièces au compte-gouttes et retravaille régulièrement son vestiaire existant. Conséquence logique : la marque ne solde jamais, pas même en vente privée.
Vous l’aurez compris, S.E.H Kelly a une âme particulière. Sa signature stylistique est l’expression d’un projet mûrement réfléchi, qui sert de fil d'Ariane aux fondateurs depuis sa création.
Test de la Kelly collar shirt en lin bleu clair (£140)
La chemise est fabriquée à Londres. L’atelier auquel fait appel la marque est réputé pour le soin apporté aux finitions de ses productions. Comme nous allons le voir, coutures et boutonnières sont irréprochables.
Que la dissection de LA chemise emblématique de S.E.H Kelly commence !
Une confection soignée
Le col Kelly est le détail signature de la marque. Il s’agit d’un tab-collar twisté de façon casual. Il symbolise à lui seul le parti-pris de S.E.H Kelly : faire cohabiter savoir-faire classique et décontraction.
Le col peut se porter ouvert (si vous avez un côté Jack Lang) ou fermé. Ses pattes sont cousues entre les deux pans du tissu et ne devraient donc pas s’arracher de sitôt...
Les coutures sont des coutures anglaises. Bizarrement, on parle de « French seam » en anglais.
On est sur du 5/6 points au centimètre, avec des coutures le plus souvent à deux millimètres du bord. Ces détails sont rarement réalisés sur une chemise décontractée et témoignent plus généralement d’une fabrication soignée.
La poche poitrine est bien dessinée : elle reste toujours bien plaquée au corps. Une véritable attention est portée aux détails : deux points d’arrêt, côté cœur, matérialisent un compartiment-stylo. Ce choix illustre la complémentarité entre raffinement et style workwear.
Les poignets sont ronds et fermés par deux boutons. Leur forme renforce la dimension casual de la pièce. Ils ne sont pas très ajustés, ce que j’apprécie personnellement pour une chemise décontractée à la coupe droite.
Enfin, le bas liquette est très propre et la jointure des coutures semble solide. Le fait qu’il n’y ait pas d’hirondelles de renfort sur une chemise casual pourrait étonner mais je l’interprète comme un parti-pris de la marque pour épurer au maximum le design de chaque pièce.
Des boutons précieux et bruts
L’atelier qui les fabrique est situé dans les West Midlands. Ils sont en corne et chacun est unique. Leur côté brut, façonné par la nature, a été préservé. Chez S.E.H Kelly, la matière brute est au cœur du produit, et le design est pensé pour la magnifier.
Ils sont cousus en croix. C’est un gage de solidité qu’on est en droit d’attendre sur une chemise à ce prix.
La matière : du lin des côtes irlandaises
Le tissage mélange un camaïeu bleu et des fils blancs. La matière est fine et a sans conteste la main la plus "nerveuse" que j’ai jamais touchée. Cela lui confère un tombé vraiment intéressant.
Le tissu présente des irrégularités, ce qui lui donne du cachet, et n’est absolument pas transparent. Le tombé est fluide et les plis marquent globalement peu pour du lin (selon moi).
Comme pour un jean, les quelques plis qui apparaissent au fil de la journée montrent que le vêtement vit et ne sont pas un problème. Last but not least, elle vous tiendra au frais pendant l’été.
Quelques mots sur la coupe
La coupe est loose et la longueur conséquente pour une chemise casual, mais il faut avouer que ça taille grand. Leur XS (taille que je prends habituellement) équivaut plutôt à un bon S français.
Cette chemise est facile à porter à condition de rester dans un ensemble plus loose que slim. Sa coupe ample et son aspect brut s’accomodent mal d’un skinny lisse par exemple.
À mes yeux, S.E.H Kelly incarne LA coupe workwear intemporelle : viser le confort sans tomber dans l’oversized.
Des tenues du style italien au workwear
Pour la première tenue, j’ai choisi de jouer la carte estivale, avec des couleurs claires et des mocassins. Les couleurs apportent de la fraîcheur, l'ensemble est lumineux.
On échappe facilement au total look blanc grâce à ce tissu composé majoritairement de fils bleus, et son aspect irrégulier crée un contraste de matière réussi. Les coupes de la chemise et du pantalon sont relativement droites, donc se complètent bien. En soi, rien de compliqué !
La seconde tenue est un peu plus forte, car très connotée militaire.
Deux contraintes se sont posées :
- garder le col de la chemise fermé impliquait de porter une cravate,
- l'aspect brut du tissu m'a poussé vers des pièces non neutres pour le haut de la tenue. J’ai donc choisi une cravate texturée, en grenadine de soie, et une surchemise vintage dont le tissu a bien vécu.
Le résultat est inattendu et plutôt original !
Si je devais résumer, je dirais que cette chemise symbolise le workwear soigné de S.E.H Kelly. L’attention portée aux détails est impressionnante mais suffisamment implicite pour ne pas brouiller un style résolument brut. La coupe est loose, dans la veine de ce style et parvient à éviter l’écueil du "trop large".
Porter cette chemise vous demandera peut-être de vous creuser un peu plus la tête qu’avec une banale chemise bleue, mais votre style ne pourra qu’en sortir bonifié.
Remarque : sur la nouvelle version de ce modèle, tout est identique à l’exception des poignets qui n’ont qu’un bouton et un système d’attache avec boutonnière. La mienne a deux boutons et une petite lanière. La preuve qu’un même modèle est retravaillé sans cesse.
Test de la "Raglan shirt" à chevrons en lin (£160)
Souhaitant m’acheter ma première surchemise, j’ai craqué pour ce modèle au design affirmé. La couleur sable est originale, la matière brute et le design résolument workwear.
Décryptage du montage
Le premier détail remarquable est la manche raglan. Cette découpe offre plus de confort et de liberté de mouvement que les montages classiques. Qui plus est, elle est finalement assez rare sur le marché…
Le col club de cette surchemise illustre la capacité de la marque à twister un détail formel et à l’insérer naturellement dans une pièce workwear.
La gorge est peu commune. Elle est simple sur la première moitié de la surchemise, puis un large carré de renfort marque la naissance d’une gorge cachée.
À noter que chaque bouton est isolé dans une petite alcôve fermée par des points de renforts, faits à la main, invisibles car cousus entre les pans du tissu.
Comme sur la chemise, la poche poitrine est très propre. Elle reste bien plaquée, même quand la chemise est pliée en vrac. Cela souligne la tension parfaite qui la maintient.
Cette poche n’est pas tout à fait fermée : le rabat ne fait que se poser. Pour le coup, les coutures sont à un millimètre du bord : un travail d’orfèvre pour une pièce aussi casual.
Les poignets sont fermés par un bouton. Petit bémol : l’absence de bouton sur la patte capucin. Pour peu que le repassage ne soit pas parfait, la manche a tendance à vriller, permettant à la patte capucin de s’entrouvrir.
Les boutons sont là aussi en corne, cousus en croix, et les boutonnières sont soignées.
Un tissu "herringbone" avec du caractère
Le lin est irlandais. Le tissage est herringbone (chevrons), un motif en V de type twill. La main est moins nerveuse que pour la chemise, car le poids plus important du tissu implique un tombé plus lourd.
Les plis marquent très peu et le défroissage est facile. Il est cohérent avec le style de S.E.H Kelly, privilégiant les étoffes brutes
Note : concernant l’entretien de cette surchemise, je vous conseille de l’étendre sur cintre pour veste dès la fin du lavage.
Le style
L’arrière de la chemise est plus long que le devant. L’esprit est donc clairement utilitaire : on doit pouvoir bouger et se pencher sans retenue.
Quant à la coupe, elle est un peu ajustée à la taille pour éviter une impression de flottement du tissu. Les plis de tension sont légers.
Comment porter une surchemise ?
À matière brute, tenue brute !
Pour mettre en valeur la surchemise, j’ai misé sur sa couleur claire. L’entourer de pièces foncées, ici un col roulé qui fait ressortir celui de la surchemise, est un choix judicieux.
Ce lin est tellement brut d’aspect qu’il n’est quasiment portable qu’avec des tissus de caractère. Le jean brut selvedge est ici votre meilleur allié.
Enfin, un roulottage conséquent du bas du jean et des bottines marron achèvent de donner à la tenue son style workwear.
Pour finir, petite combinaison des deux pièces S.E.H Kelly. Les deux cols s'associent bien, leurs matières rugueuses se font subtilement écho.
Pour le reste de la tenue, j’ai gardé mon jean brut mais j’ai troqué les bottines contre une paire de derby. La tenue est tout de suite moins workwear et plus urbaine. Mais elle n’est pas fade pour autant, les derby ayant aussi un aspect patiné.
Cette surchemise est selon moi la pièce idéale de la mi-saison. Sa matière est dense mais garde les propriétés respirantes du lin. L’association entre le tombé fluide de la matière et un tissage très brut reste assez rare en prêt-à-porter.
En revanche, son design et sa matière sont tellement connotés workwear qu’il est pratiquement impossible de la porter avec autre chose qu’un jean brut. Plus les vêtements que vous lui associerez seront lisses, plus elle jurera et rendra votre tenue incohérente.
À titre personnel, j’aime posséder des pièces propres à un univers. Cela donne une véritable orientation à votre look. De quoi épicer votre vestiaire !
Le mot de la fin...
S.E.H Kelly évolue dans un style résolument casual, voire workwear, en associant matières de qualité et design affirmé.
Ils s'appuient des étoffes et une confection britanniques, mettant l'emphase sur des pièces à l'esprit intemporel.
Ils construisent un vestiaire rationnel au fil du temps. Pour illustrer leur habitude de retravailler sans cesse leurs classiques, je ne peux que citer Boileau (L’Art poétique, 1674) : « Hâtez-vous lentement, et sans perdre courage / Vingt fois sur le métier, remettez votre ouvrage / Polissez-le sans cesse, et le repolissez / Ajoutez quelquefois, et souvent effacez. »
Les photos ont été prises aux Baux-de-Provence par Sarah Meyssonnier.