La Fabrique Nomade, quand les destins s'entremêlent

La Fabrique Nomade, quand les destins s'entremêlent
Parmi toutes les associations qui travaillent le textile, l’une d’entre elles a particulièrement retenu notre attention : La Fabrique Nomade. Fondée en 2016 par Inès Mesmar, cette initiative aide des artisans du monde entier à s'insérer professionnellement en France, à travers une formation complète.

Vous nous connaissez, chez Bonnegueule, quand on parle de textile et de savoir-faire, on fonce. Les vêtements sont chargés de belles histoires et on aime vous les raconter. Nouveau chapitre : La Fabrique Nomade. 

Tout commence le jour où notre rédacteur en chef Christophe revient d’un événement à La Caserne. Sur place, il rencontre de nombreux acteurs du marché du textile qui tentent de faire évoluer le secteur.

Il ouvre la porte et me regarde avec un air guilleret : “Quentin, j’ai un sujet pour toi ”. Ni une, ni deux, je m’empresse de le rejoindre pour écouter attentivement ses paroles. Il me dit avoir rencontré "des personnes fantastiques à La Caserne", et qu'il faut que j'aille les voir. Face à tant d'engouement, je ne peux que foncer. Sans poser de questions.

Durant quelques heures, je scrute le web à la recherche d'informations sur La Fabrique Nomade. C'est une association ayant pour objectif de réhabiliter le savoir-faire d'artisans sur le marché textile Français. 

La Fabrique Nomade ne se contente pas de former des artisans venus du monde entier, elle aide les adhérents à s'intégrer dans la société en tant qu’humain. Des vêtements et des Hommes. 

la fabrique nomade logo

Découverte du projet

Mais il m'en faut plus. C'est la raison pour laquelle je me décide à partir à la rencontre d'Inès Mesmar, fondatrice de La Fabrique Nomade, pour qu'elle nous partage son parcours et ses ambitions.

Bonne gueule

Inès Mesmar, fondatrice de La Fabrique Nomade à la France des solutions 2021

Quentin : D'où vous est venue l’idée de créer La Fabrique Nomade ?

Inès : Je suis tombée par hasard sur des broderies faites par ma mère, cachées dans son armoire. C’est comme ça que j’ai découvert le métier de ma mère en Tunisie. Je n’en savais rien avant, j’avais 35 ans à l’époque ! Après cette découverte, je fais le lien entre son histoire, le fait qu’elle n’ait pas réussi à faire reconnaître ses compétences et le fait qu’elle n’ait pas trouvé de place. Je ressens ce sentiment de gâchis, de la personne qu’elle aurait pu être.

Q : J’imagine que c’est l’élément déclencheur …

I : Je suis allée enquêter dans les centres d'hébergement pour essayer de comprendre la situation des artisans et comment, aujourd’hui, on reconnaît les compétences des gens qui arrivent en France, notamment dans les métiers de l’artisanat. 

Q : Qu'avez-vous tiré de cette enquête ?

I : Cela m’a amené à la conclusion que les personnes, peu importe leur métier, rencontrent des freins communs : la barrière de la langue, l’absence de réseau, le fait qu’on ne reconnaisse pas leurs compétences en France. Ce qui les amène à travailler dans des secteurs en tension tels que la sécurité, la restauration, l'hôtellerie ou encore le BTP.

Q : Et au début, comment le projet est-il reçu ?

I : Je le dépose à un think tank, la Ruche. Le projet est reçu, un communiqué de presse est lancé, et j’ai déjà trois articles publiés alors que le concept n’est même pas encore lancé. Ghaita entend parler de la Fabrique Nomade dans un article de Libé, elle rejoint l’association : c’est la première bénévole ! 

Q : Un accueil très positif, alors !

I : Oui ! En peu de temps, on commence à lier des partenariats, à faire notre première collection. On a collaboré avec trois artisans et trois designers français, et c’est comme ça que ça a démarré. On voulait montrer les compétences, et aussi la capacité d’adaptation de ceux qui passent par la Fabrique.

Bonne gueule

Actuel magasin et atelier de La Fabrique Nomade (rez-de-chaussée)

Q : Aujourd’hui, ça ressemble à quoi une formation à la Fabrique Nomade ? 

I : C’est costaud. On a créé un cursus de 8 modules, avec du Français, de l’économie, de l’approfondissement des connaissances techniques, beaucoup de pratique … On a voulu mettre en place une formation complète, pas seulement spécifique à l’artisanat, mais aussi avec des compétences plus transversales. Il y a plusieurs cycles dans la formation. L’artisan, peu importe sa spécialité, doit présenter un projet professionnel, faire un stage, passer devant un jury. 9 mois, ça peut sembler long, mais c’est très court ! Quand tu dois perfectionner ta technique, apprendre le Français, toutes ces choses prennent du temps … Il faut que l’artisan vienne plus motivé que jamais. 

Q : Comment recrutez-vous les talents ?

I : (rires) Le premier gros boulot, c’est d’aller les chercher ! On s’appuie beaucoup sur nos prescripteurs, les centres d’hébergement... ce sont nos premières cibles. Pôle emploi, l’office de l’immigration mais également le bouche-à-oreille qui fonctionnent aussi. D’ailleurs je précise que tous les artisans sont régularisés, ont obtenu le droit de séjour et leur autorisation de travail.

Q : J’ai lu dans un article que votre mission première, c’était “de redonner confiance” …

I : Il le faut. Il faut reconnaître ce qu’ils sont, et ce qu’ils apportent. C’est plus que de la confiance en soi, cette reconnaissance est nécessaire à un processus d’intégration. C’est ce qui construit leur future place dans la société. Quand la personne arrive en France, elle a tout perdu, elle n’a plus confiance en elle. Du coup, il faut restaurer cette part d’identité et leur permettre de reconstruire leur personne.

Bonne gueule

Actuel atelier au sous-sol des locaux.

La rencontre avec les artisans

Une fois l’interview finie, je n’ai qu’une seule envie : pousser les portes de la Fabrique Nomade et rencontrer ces artisans, dans leur environnement. 

Le soleil à peine levé, je me tiens devant l’atelier. Au 1 bis avenue Daumesnil, j'entre dans un autre univers : coups de marteau, odeur de colle, du tissu partout. Sur deux étages, plus d’une vingtaine d’artisans en train de coudre, de tricoter, de limer. L’ambiance est studieuse et chaleureuse. En voyant toutes ces personnes travailler, je meurs d’envie de pouvoir parler avec eux, connaître leur histoire. 

Après avoir discuté avec Inès et Gaita, je suis amené à rencontrer quatre artisans, plus passionnés et passionnants les uns que les autres. Laissez-moi vous les présenter.

Anastasia

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Anastasia Spravedlyva, brodeuse

Anastasia est une brodeuse née : après deux années d'études dans le domaine, elle travaille un an et demi comme brodeuse chez Sanahunt, un fournisseur haut de gamme pour de grandes maisons de luxe. 

En parallèle, elle donne des cours de broderie dans un lycée pour transmettre son savoir-faire. 

Anastasia aime imaginer, dessiner, choisir les matières et ensuite broder. Cela lui permet d’exprimer sa personnalité. Elle aime broder sur des matières naturelles comme le coton, la laine ou le soie.

Arrivée en France en mars 2022, elle intègre La Fabrique Nomade en avril 2022. Elle souhaite s’améliorer sur certaines techniques, comme le lissage, et apprendre à parler Français. A seulement 30 ans, elle aimerait être salariée dans une maison de luxe comme Dior ou Chanel après sa formation. Ambitieuse, elle songe même à créer un atelier dans l'Hexagone après plusieurs expériences professionnelles sur le marché du travail français.

Zakaria

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Zakaria Tsitsriashyili, bijoutier

Lorsque je rencontre Zakaria pour la première fois, je comprends tout de suite que je m'adresse à un vrai passionné. 

Dès son plus jeune âge, Zakaria souhaite devenir bijoutier. Adolescent, il fait une école de bijouterie en Georgie puis se met à travailler à son compte, en fabriquant des bijoux faits main en or, argent ou platine. 

La spécialité de Zakaria est le polissage, le sertissage et le travail des pierres artificielles ou naturelles comme le diamant. 

Âgé de 62 ans, Zakaria est déterminé à poursuivre sa passion en France. C’est pourquoi il a décidé d'intégrer la promotion 7 de la formation métiers d’art de La Fabrique Nomade en 2022.

Mariam

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Mariam Mossa, couturière

Mariam et la couture, c’est une grande histoire d’amour. Dans son village, en Egypte, c’est elle qui confectionnait les vêtements. Malgré son BAC Pro couture, elle finit par travailler dans une entreprise de fabrication de robes de cérémonie pour enfants, linges de maison, housses de coussin…

Mais Mariam n’en démord pas, elle veut travailler dans la couture et décide de continuer son apprentissage en Italie pendant presque un an.

Tout juste arrivée en France, alors âgée de 36 ans, elle fait des emplois alimentaires, puis intègre La Fabrique Nomade qui lui permet de nouveau de rêver son avenir en grand.

Lianna

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Lianna Mkrtchyan, couturière

Lianna, c’est la technique pure : stumpwork, point plat, point de chaînette, point de croix, du canevas, crochet, macramé …

À 47 ans, c’est une couturière confirmée. Elle a l’habitude de travailler avec différents matériaux, autant pour ornementer des pièces de prêt-à-porter, réaliser des accessoires textiles ou pour concevoir des bijoux.⁠ 

A la suite de son arrivée en France, en 2013, elle travaille pour une marque de vêtements pour bébés -mais elle ne fait pas assez de couture à son goût. Ainsi, elle fait le choix d’aller se former à la Fabrique Nomade en 2021, afin de pouvoir prétendre à des postes spécialisés dans la couture.

Dans les prochains épisodes, vous suivrez les aventures de ces quatre artisans qui ont la profonde envie d’apprendre de nouvelles compétences dans leurs métiers. En pleine immersion au cœur du projet, nous assisterons à des exercices pratiques, à des stages et bien plus encore. Ils vous montreront toutes les coulisses de leur formation, avec sincérité et détermination. 

Quentin Azoula,

Hello, moi c'est Quentin. Fan inconditionnel de sport, j'adore découvrir les tenues sportwear du moment. Je crois que ma couleur préférée est le rouge. Oui, je n’en suis pas sûr, mon daltonisme me fait peut-être défaut.Ah et j'allais oublier, c'est moi qui édite vos articles (et qui les rédige parfois).

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